Le Bénin compte de nombreux humoristes. Ils font rire, sourire. Ils font oublier des soucis, du moins un instant. Ils dénoncent aussi subrepticement. Le meilleur humoriste révélé cette année par le Festival international ‘’Bonjour Bénin’’ est Hafissou Sogotedji. Il nous rappelle ici ce qu’est l’humour. Le festival ‘’Bonjour Bénin’’ représente, selon lui, une clinique dans laquelle les médecins humoristes se mettront ensemble pour soigner le mal dont souffre cet art encore vierge au Bénin.
Propos recueillis par A. B. AGBON et P. ALOMAKPE (Coll ext.)
La décision des membres du jury du concours national d’humour organisé dans le cadre du Festival Bonjour Bénin vous consacre meilleur jeune humoriste. Avez-vous le sentiment d’avoir mérité ce sacre ? Si oui présentez-vous aux internautes ?
Il faut dire que ce qui a été un avantage pour moi lors du concours national de l’humour organisé dans le cadre du festival international Bonjour Bénin 2019, c’est le fait d’avoir traité d’un sujet original qui a marqué le public à un moment de leur vie. Il s’agit de la période sociopolitique actuelle, celle du nouveau départ et de la rupture. Certes les esprits se focalisent sur les difficultés des moments difficiles, mais si cette douleur est analysée et traitée sous l’angle du comique et de l’humour, le sujet a forcément un effet. C’est ce qui a séduit le public et certainement les membres du jury. L’humour est un art. Il ne ment pas. Les dix candidats à la compétition ont tous présenté des sketchs de 5 à 7 minutes. Mais mon spectacle a été le fruit d’un travail de longue haleine. Vous ne pouvez pas avoir idée du nombre de nuits blanches et de la durée de concentration qu’il m’a fallu pour aboutir à ce résultat. Et par respect pour le travail que chacun de nous a abattu, le jury m’a certes désigné vainqueur avec bien sûr l’accord du public, mais je dirai que cette victoire est à nous tous.
Hafissou Sogotedji avec son trophée de meilleur humoriste
Que savoir sur vous ?
Mon nom d’artiste est Capitaine Virus. Je suis originaire de Malanville mais je suis né à Cotonou et j’ai grandi à Parakou. Fils de mon père défunt Hamadou Sogotedji (paix à son âme) précédemment Sapeurs-pompiers et de ma mère Banikoare Amina. Je suis célibataire avec beaucoup de neveux et de nièces (rire). Je puis dire de moi-même que je suis très timide, parfois on me demande comment j’arrive à être comédien avec cette timidité. Ma réponse : la profession, on ne joue pas avec !
Parlez-nous de votre spectacle qui a séduit les membres du jury
Mon spectacle est intitulé : ‘’Le rêve’’. Il part d’une histoire de gay-man pour traiter des faits et réalités de la période de la répression contre ce phénomène au Bénin baptisée ‘’Opération Rambo’’ avec bien sûr une touche d’humour. Le spectacle traite également des situations politiques du Bénin. C’est une caricature du réel de la société béninoise depuis 2016. En gros, la force de ce spectacle c’est qu’elle fait revivre aux populations avec une touche d’humour, des moments difficiles qu’elles ont traversés. Comme dirait quelqu’un : “Il faut sortir du tragique par le comique”.
Que pensez-vous de l’humour au Bénin ? Avez-vous le sentiment qu’un festival comme ‘’Bonjour Bénin’’ participe au rayonnement de cet art ?
Contrairement à ce que les gens pensent, moi je dirai que l’humour au Bénin se porte très bien. Mais comme l’être humain il a besoin de suivi et de traitement régulier. On dit souvent que l’homme est un malade ambulant, notre humour va bien mais c’est aussi un malade ambulant. Le rôle de médecin nous revient à nous humoristes pour la bonne santé de cet art. Comme vous pouvez vous en douter la clinique dont nous médecins (humoristes) avons besoin pour le traitement de notre patient, c’est bien sûr des événements comme ‘’Bonjour Bénin’’ (qui devient festival Noukiko). Mais dans le même temps il ne suffit pas d’organiser un événement pour prétendre contribuer au développement de l’art, il faut être conscient des besoins à tous les niveaux afin que les choses se déroulent dans de bonnes conditions. Bonjour Bénin (festival Noukiko) peut contribuer au développement de l’humour si et seulement si, il y a un sérieux au tour.
Quels sont vos projets au cours de votre mandat de jeune meilleur humoriste du Bénin ?
Je place mon mandat de meilleur jeune humoriste sous le sceau de la responsabilité. Je résume donc mes projets en une seule phrase : Contribuer au rayonnement de l’humour au Bénin en général et en particulier au nord du Bénin qui jusque-là reste vierge. De façon spécifique, j’organiserai des soirées d’humour dans ma localité, Parakou ; soirées au cours desquelles j’inviterai les frères du Sud pour un brassage avec nous ici. J’organiserai des scènes de discussion, d’échange et de partage de connaissances en matière d’humour avec les autres humoristes de chez moi et peut-être avec des invités d’ailleurs. Lors de ce mandat je sortirai mon tout premier spectacle qui est actuellement en cours d’écriture. Il y a aussi un projet de tournée nationale avec les cinq premiers lauréats du Concours nationale d’humour. Je donnerai le meilleur de moi-même pour la réussite de cette activité. Tout ceci ne peut être possible qu’avec votre aide, l’aide des autorités à divers niveaux, des opérateurs économiques et toutes les bonnes volontés qui veulent le développement culturel en général et de l’humour en particulier. Donc je lance un appel à l’endroit de tout le monde !
Votre mot de la fin
Un grand merci à tous pour le soutien direct et indirect. Vous m’avez fait confiance et moi je n’ai fait que mon devoir. Je dédie cette victoire à toute la population béninoise car c’est le Bénin qui a gagné. Je demanderai aussi aux autorités à divers niveaux, aux opérateurs économiques, à toute personne capable de faire un geste pour le développement de l’humour au Bénin, de ne pas ménager les efforts. Et aussi à mes frères, amis et collègues, je dirai, travaillons. Car : ” Le Bénin a un incroyable talent” Merci.
