En vue de défendre l’agriculture dans un contexte de changements climatiques sévères, Credel et Idid mettent en œuvre depuis 2018, le Projet ‘’Mieux comprendre-Mieux s’adapter’’ (Maca) pour le renforcement de la résilience des agriculteurs/trices des communes de Dangbo et de Ouidah. A quelque mois de la fin, les bénéficiaires de Dangbo ont rejoint ceux de Ouidah dans leurs parcelles témoins, vendredi 11 septembre, pour une visite d’échange d’expériences.
Par Sêmèvo B. AGBON
La première étape de la visite a conduit la délégation dans un champ de manioc à Assogbénou-Daho. Le propriétaire de ce qui sert de parcelle de démonstration n’est rien d’autre que le chef du village, Lucien Mèdjogbé. Entouré de ses manœuvres -des femmes essentiellement- l’homme a accueilli les membres du cortège qui ont observé et apprécié l’évolution des différentes variétés du tubercule. Mises en terre il y a environ deux mois, l’Ina-H et MR 67 rivalisent de croissance au côté de la variété locale. Au regard de ce laps de temps, « ils poussent bien », se sont réjoui l’animatrice Adéoti Imarath et les chargés de projet Aurore Akplogan (Dangbo) et Eusèbe Kapo (Ouidah)
Houessou Pascal, président de l’Union communale des producteurs de riz (Ucr) et Nathaniel Donou Kossou, président des maraichers ont conduit la forte délégation de Dangbo. « Credel et Idid nous aident à nous adapter au changement climatique : des stratégies pour cultiver et avoir un bon rendement qu’il pleuve excessivement ou que la sécheresse soit précoce ou prolongée », reconnaît d’entrée ce dernier. « Nous souffrons énormément avec les changements climatiques. Soit, la décrue n’est pas observée quand il le faut. Soit, on sème en retard pour être encore confronté aux pluies tardives. Avec Idid et Credel, nous avons des forages. Avant nous cultivions dans les bas-fonds, mais maintenant, pour une première, sur terre ferme. Et ça pousse bien », renchérit Houessou Pascal.
Ce sont eux, ces présidents d’associations et leur suite venus de Dangbo qui s’informer prioritairement des expériences de leurs homologues. Ont dominé les discussions menées sous la direction des chargés de projet, les manières appropriées pour planter le manioc et les stratégies de lutte contre les agressions bactériennes et les chenilles. La première étape a duré près de deux heures d’horloge. « Les échanges du jour m’ont permis par exemple de savoir qu’il y a plusieurs manières de planter le manioc. Aussi, nous n’avions pas du tout des astuces pour contrer les rongeurs. C’est aujourd’hui que nous avons appris que soit, l’huile de neem soit le savon palmida dilué dans de l’eau et aspergé aux plantes permet de combattre la ‘’mousse blanche’’ et les chenilles », a témoigné l’hôte, Lucien Mèdjogbé.
L’esprit de ce champ d’expérimentation comparative est de retenir à la fin, « laquelle des différentes variétés va la mieux résister au changement climatique avec un meilleur rendement », a indiqué Eusèbe Kapo. « Nous ne disposons pas encore de résultats palpables. C’est à la fin que nous tirerons les conclusions pour l’avenir », souligne justement le propriétaire du champ de manioc.
Tuteurage
«L’activité aujourd’hui, inclus dans le projet est une visite d’échange d’expérience. Elle consiste à faire déplacer des agriculteurs de Dangbo à Ouidah. Il faudrait en effet que ceux qui sont à Dangbo viennent visiter les fermes de Ouidah, et vice versa pour voir quelle expérience tirer », justifie Eusèbe Kakpo. La seconde et dernière étape de la visite a donc amené les mêmes délégations chez Paul Agblo alias ‘’Atavi Gaga’’. Dans son champ témoin situé à Towénou, dans l’arrondissement de Houakpè Daho trois variétés de tomate dont deux améliorées (Padma, TLCV) sont en démonstration avec Akinkonkouin (variété locale). Laquelle va résister au changement climatique et dont le rendement sera meilleur ? Attend-on.
Dans le champ, les produits chimiques sont bannis. Des fientes d’animaux (poules et coqs notamment) acquis chez Agrisach servent d’engrais. Les cultures sont irriguées au moyen d’un système de forage fonctionnant sur énergie solaire fournit par Credel. Deux mois seulement viennent déjà de s’écouler après la semence. Qu’est-ce qui a changé ? « Nous avons de bons fruits, des tomates en pleine forme malgré l’absence de pluie depuis des semaines ; des variétés résistantes au flétrissement bactérien et au poche de sécheresse », commente Eusèbe Kapo. De son côté, le producteur observe que « les variétés Padma et Akinkonkouin se révèlent nettement mieux par rapport à TLCV dont les fruits tombent précocement ».
Autre nouveauté, le système de tuteurage : une partie des tomates sont munies de piquets auxquels elles sont attachées « pour les soutenir et les redresser ». L’avantage, « Les fruits ne touchent pas le sol. Sinon pendant la sécheresse quand les fruits tombent sur le sol chaud, cela accroît leur pourrissement. Quand on les met sur tuteur la plante se développe autour du piquet et les fruits sont ainsi protégés. En temps d’inondation ils sont plus résistants », magnifie l’animatrice Adéoti Imarath aux visiteurs.
La visite s’est achevée dans ce vaste champ de tomate. Les agriculteurs/trices sont retournés plus motivés et engagés.
Quid du MCMA
Face aux problèmes de poches de sécheresse et d’inondation précoce, ou de démarrage tardif de pluie, le Projet ‘’Mieux comprendre-Mieux s’adapter’’ (MACA)
vise à accompagner les agriculteurs/trices de quatre filières (riz, maïs, manioc et cultures maraîchères) à maîtriser de nouvelles technologies et meilleures pratiques agricoles d’adaptation aux changements climatiques. Par ailleurs, les autorités départementales et nationales seront amenées dans le cadre du projet à prendre des décisions favorisant l’adaptation aux changements climatiques et l’amélioration de la résilience des communes.
C’est en 2018 que le gouvernement du Québec a octroyé un financement à Oxfam-Québec et ses deux partenaires locaux que sont Idid (Initiatives pour un développement intégré durable) et le Credel (Centre de recherche et d’expertise pour un développement local) pour sa mise en œuvre. 206 exploitations agricoles sont bénéficiaires dont 6 exploitations modèles servant de démonstrateurs et de lieux de formation aux autres agriculteurs/trices des communes.
A la fin du projet, les meilleurs options seront capitalisées et vulgarisées à l’échelle communale voire nationale pour une adoption au niveau des autres producteurs.