La deuxième édition du Festival international des films de femmes (Fiff) de Cotonou 2021 a pris fin, vendredi 11 février sur le sacre de « Kuma ! », documentaire fiction de la malienne Hawa Aliou N’Diaye. Directeur exécutif du centre culturel Artisttik Africa qui a accueilli la projection des films en compétition, Arcade Assogba retient que le Fiff a été une opération réussie. Tout en avouant la marginalisation des femmes dans le secteur du cinéma, le réalisateur y voit un « phénomène global » contre lequel les concernées s’élèvent de plus en plus avec des résultats probants. Il s’est confié à nous deux jours avant la clôture du Festival conduit par la jeune Cornelia Glèlè.
Propos recueillis par Sêmèvo Bonaventure AGBON
Bénin Intelligent : Qu’est-ce que ça vous fait d’accueillir les projections du Fiff Cotonou pour la deuxième fois dans vos murs ?
Arcade Assogba, réalisateur : Très honnêtement, c’est un plaisir. Cornelia Glèlè, lors de la première édition du Fiff Cotonou est venue nous voir pour solliciter notre soutien. Nous l’avons accompagnée de façon totalement volontaire, nous l’avons accueilli gracieusement au fait. Cette année, elle a eu la sympathie de nous revenir en nous disant : « Vous m’aviez accueillie les bras ouverts. Cette fois-ci je n’ai pas mal de ressources. Les gens me sollicitent ailleurs mais j’insiste pour venir encore chez vous, parce que le cadre me plaît et j’avais été bien accueillie. Vous m’avez aidée à grandir un peu et on ne peut pas oublier ceux avec qui on a commencé ». Nous sommes sensibles à ces mots par rapport à ce que nous déployons ici. Le plus important pour nous, c’est que les artistes arrivent à concrétiser des choses et que le centre culturel Artisttik Africa serve vraiment de lieu de rencontres, de démonstration du meilleur des choses que nous sommes capables de produire.
Le Fiff Cotonou 2021 se veut féministe. Quel regard portez-vous sur le travail des femmes à travers les projections de ce mercredi 9 février ?
Le Fiff est un festival un peu connoté. Le programme de ce soir a en grande partie rapport avec la femme, c’est une belle programmation. Nous avons vu des films aussi bien du Bénin que du Maghreb, de Madagascar. On a traversé l’Afrique du cap au Caire, et cela c’est génial avec des propos de femmes, des sujets pas toujours féminins mais portés par des femmes. Je trouve que c’est très intéressant. Vu l’engouement du public, on a vu des gens qui ressentaient des émotions. De l’endroit où j’étais assis je pouvais voir les rires spontanés. C’est une opération réussie à mi-parcours.
Il est dit que les femmes sont marginalisées dans le secteur du cinéma. Qu’est-ce qui se passe ?
C’est l’environnement du cinéma même qui fait ça on va dire. C’est un métier très beau, des produits très intéressants destinés au public mais pour les fabriquer il faut assez d’énergie. Et pendant longtemps, on a toujours pensé que les femmes n’étaient pas très portées vers des métiers où il faut dépenser de l’énergie, il faut avoir les muscles et en avoir dans la tête. Ce n’est pas seulement au cinéma. Ce qu’on reproche au cinéma on peut le voir dans tous les secteurs d’activité de la vie. C’est un phénomène global, mondial. Il y a des femmes qui se soulèvent de partout dans le monde. Il y a des femmes qui depuis longtemps, même si elles ne sont pas nombreuses, ont travaillé et ont beaucoup apporté au cinéma. Moi, à titre personnel l’une de mes références au cinéma c’est une femme de grande référence, que je porte en haute estime : c’est la scénariste et réalisatrice française Claire Denis, une femme extraordinaire qui a mis sur la scène pour la première fois notre compatriote Isaac Bankolé. Elle a fait beaucoup de films dont « S’en fou la mort ». Quand je commence par sentir un vide d’une certaine manière je retourne à ce film. Ces genres de productions, elle en a fait assez. Donc les femmes, dans le cinéma, n’ont pas toujours été au nombre qu’il faut parce qu’elles sont quand même majoritaires sur la planète, mais elles sont en train de se bagarrer. Il ne faut pas croire que ce sont les hommes dans le métier qui les marginalisent. De toute façon quand on veut obtenir quelque chose il faut se bagarrer, il faut se battre.
Merci.