Les étudiants du Département des Lettres modernes de l’Université d’Abomey-Calavi ne veulent plus soutenir en fin du cycle de Licence. Ils réclament aussi le recrutement en urgence d’enseignants qualifiés. Ce sont les deux revendications adressées au recteur de l’Université d’Abomey-Calavi (avec ampliations au ministère de l’Enseignement, au décanat…) à l’issue d’une assemblée générale qu’ils ont tenue vendredi 3 mars.
Par Sêmèvo Bonaventure AGBON
La demande de suppression des soutenances en fin de cycle de Licence « n’est pas justifiée », commente le professeur Raphaël Yebou, enseignant au Département des Lettres modernes. Les signataires de la lettre la motivent, eux, par ce qu’ils qualifient d’«inconfortable situation».
Actuellement, exposent-ils, « trois promotions d’étudiants à savoir : 2019-2020, 2020-2021 et 2021-2022 ayant déjà validé toutes les Unités d’enseignement (Ue), n’ont toujours pas été appelées à soutenir. Pire, ce n’est qu’en décembre 2022 que ce nombre pléthorique d’étudiants fut invité à déposer les protocoles de mémoire, dont on a aucune suite jusqu’à présent».
De plus, des étudiants d’autres promotions antérieures à 2019 seraient aussi dans le même cas. Face à ce tableau, les étudiants des Lettres Modernes estiment que l’annulation de la soutenance permettra « de libérer plus facilement et rapidement les étudiants en fin de formation à l’instar des facultés sœurs comme la Fadesp et la Fast».
Mais pour soutenir le mémoire de licence, il faut avoir validé toutes les matières. Cette condition retient un certain nombre d’entre eux. On ne doit pas l’oublier
Le professeur émérite Augustin Ainamon, se penche du côté des étudiants. « Soutenance ou pas soutenance, il faudrait qu’on évite d’ajouter une année supplémentaire (deux semestres) aux étudiants et faire revenir le format de la maîtrise sans aucun diplôme correspondant. Le LMD ou processus est une architecture très minutieuse et si par malveillance ou par incompétence nous touchions à cet édifice sans tenir compte de l’harmonie de l’ensemble nous pourrions tout faire écrouler », prévient-il.
«Il faut qu’on s’organise effectivement pour que les étudiants soutiennent quelques mois après la proclamation des résultats des semestres 5 et 6», partage Raphaël Yebou. «Mais pour soutenir le mémoire de licence, il faut avoir validé toutes les matières. Cette condition retient un certain nombre d’entre eux. On ne doit pas l’oublier», souligne-t-il dans un forum WhatsApp.
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Le retard des soutenances vient de l’insuffisance d’enseignants au Département des Lettres Modernes. Les étudiants appellent à un « recrutement en urgence ». Une revendication plus qu’urgente », reconnaît aussi le grammairien Raphaël Yebou, Maitre de conférences/Cames.
Selon la lettre dont nous avons copie, le Département des Lettres Modernes ne compterait actuellement que huit (8) enseignants, une faiblesse numérique source d’esclavage, compatit les étudiants. Les huit enseignants, «ont déjà du mal à assurer toutes les Unités d’Enseignement de ces six (06) différents semestres en Licence», observent les étudiants.
«Comment pourront-ils encadrer ce nombre pléthorique d’étudiants en instance de soutenance ? Arrivent-ils même à corriger les copies d’évaluations semestrielles tout seuls ? Assument-ils convenablement leurs heures de cours dans les autres universités du Bénin, en l’occurrence l’Université de Parakou et l’Ens de Porto-Novo ?», s’interrogent-t-ils.
Préjudice financier
Les étudiants du Département des Lettres Modernes avouent que la non-exécution des soutenances « jette du discrédit sur [eux] dans [leurs] modestes familles». Comment ?
« Les amis avec qui nous avons obtenu le diplôme du Baccalauréat la même année, ont fini depuis et repartent au village dire aux parents qu’ils ont fini. Certains se sont déjà inscrits en Master. Ainsi, quand nous rentrons au village, les parents estiment que, en réalité nous avons échoué et que nous n’avons pas le courage de le leur avouer », témoigne au téléphone Morel Tchaou, l’un des signataires.
La non programmation des soutenances en fin de cycle, porte préjudice aux étudiants étrangers. « Ils sont là depuis plus de cinq ans. Ils vont rentrer chez eux bredouille ? », redoute Morel Tchaou, qui fait également cas des impacts économiques de ce statu quo dans le rang des nationaux. « Les étudiants ont loué des chambres à Abomey-Calavi, se nourrissent seuls, c’est difficile ».
L’ensemble des étudiants du Département des Lettres modernes de l’Université d’Abomey-Calavi sollicite du recteur «une audience urgente [avec] les responsables de notre Assemblée Générale dans un délai de 96h à compter de la signature de la correspondance.
«Passé ce délai, les étudiants des Lettres Modernes se donneront le droit de procéder à un sit-in, puis à une journée Fac Morte et enfin à un mouvement de grève générale à mesure que satisfaction ne nous est pas accordée», ont-ils prévenu.
Morel Tchaou apprend que la lettre adressée au recteur a eu pour effet, la publication de la « liste des protocoles déjà étudiés ». « Il faut observer que cette liste a été signée depuis le 9 février 2023, donc ils ont attendu que nous déposions notre courrier le 3 mars avant de la publier. C’est dire que volontairement ils ne sont pas dans l’optique d’accélérer le processus », critique-t-il tout de même.
1 Commentaire
J’ai vraiment validée cette décision. Car, les docteurs ne taillent plus d’importance aux étudiants en fin de formation. Ce qui fait qu’ils tardent dans leur programme. Ces derniers rattent parfois leur destin à cause de la non libération.