En plus de paraître trop politique, Claudine Prudencio à la tête de l’Inf incarnait une génération conservatrice face à une armée de jeunes femmes modernes et très progressistes notamment en matière de sexualité. Analyse !
Curieux ? tout à fait ! le départ de Claudine Prudencio de la tête de l’Institut national de la femme (Inf) a littéralement « réjoui » des femmes dont elle avait pourtant pour mandat de défendre les droits, la dignité.
En privé comme en public, ses «sœurs » lui reprochent son conservatisme, son ‘’africanité’’ exagérée dans un monde en mutation. Rappelons-nous, en effet, de sa publication incendiaire sur Meta intitulée ”𝗠𝗢𝗡 𝗜𝗡𝗗𝗜𝗚𝗡𝗔𝗧𝗜𝗢𝗡 𝗔𝗨 𝗦𝗨𝗝𝗘𝗧 𝗗𝗘𝗦 𝗔𝗧𝗧𝗘𝗜𝗡𝗧𝗘𝗦 𝗔𝗨𝗫 𝗕𝗢𝗡𝗡𝗘𝗦 𝗠œ𝗨𝗥𝗦 ” en date du 14 mai 2022.
En digne présidente, elle s’y offusquait de la diffusion « à travers les canaux digitaux … d’images obscènes qui touchent à la dignité et à l’honorabilité de la femme ». Dans son imaginaire, Claudine Prudencio se voyait dans la bonne démarche : mère, elle aussi, elle tenait à conseiller, à éduquer « ses filles ». Et donc, elle disait bien agir en dénonçant l’« homosexualité, le phénomène Porta potty, [la] promotion des actes sexuels » en vogue, sans scrupules, sur les réseaux sociaux.
Claudine Prudencio était légitimement blessée par ce règne exponentiel de la perversion. Ce qui lui inspire « amertume et grande déception » en ce sens que « ces scènes … portent atteinte à la culture et à la tradition puis aux bonnes mœurs ».
Culture et tradition ! là elle a tiré le diable par la queue. Ce sont justement contre les cultures et traditions rétrogrades que se battent la horde très déterminée et instruite de féministes Béninoises. De sorte que parler aujourd’hui de cultures et traditions, sans séparer le bon grain de l’ivraie, rend aphone.
Carine Danhouan, activiste au sein de l’Ong Jfad, attend par exemple des membres de l’Inf, « Qu’ils développent des programmes qui pourraient aider à la déconstruction des normes qui nous condamnent aujourd’hui à devoir réclamer, sévir pour obtenir un traitement d’humain en tant que fille et femme ».
Culture et tradition ! là elle a tiré le diable par la queue. Ce sont justement contre les cultures et traditions rétrogrades que se battent la horde très déterminée et instruite de féministes Béninoises. De sorte que parler aujourd’hui de cultures et traditions, sans séparer le bon grain de l’ivraie, rend aphone.
Quant à l’homosexualité, et plus globalement la communauté Lgbtq+ qui se fait discrète au Bénin, l’opinion tranchée de Claudine Prudencio a là aussi blessé. « Si vous mettez l’homosexualité comme une atteinte aux bonnes mœurs, alors vous voulez soumettre que ça soient les homosexuels, les activistes défenseurs de cette cause à la vindicte populaire… Je suis d’accord qu’il y a des enjeux contextuels concernant la dépravation des mœurs mais y inclure spécifiquement l’homosexualité qui fait partie intégrante de la sexualité humaine c’est ignorer la liberté d’être des uns et des autres », lui opposait un internaute en commentaire.
« Nos priorités »
Auprès de nombreuses activistes, Claudine Prudencio semblait marcher à contre-courant, peut-être sans en être consciente. Elle ramenait à la désuète « civilisation masculine » et était suspectée de prôner le terrorisme des normes culturelles.
L’ex présidente du parti Udbn croit dur comme fer que « nos bonnes mœurs constituent une caractéristique fondamentale de l’Afrique et plus particulièrement de notre pays le Bénin ». Elle invitait alors « toutes les filles et toutes les femmes à prendre conscience de la déchéance morale qui sévit actuellement au nom d’un certain droit de l’homme ».
Le post de trop ? Ce jour-là, il s’est avéré que plus rien n’allait entre les Béninoises et « leur » présidente. Ce post avait sérieusement choqué notamment dans le rang des activistes féministes.
« Ce ne sont pas nos priorités Madame la présidente. Ce discours n’est pas celui des priorités des filles et femmes du Bénin. Avec ce type de discours, en tant que fille, moi S.B., l’accès à la justice pour mes droits est davantage menacé », lui avait rétorqué une activiste, présidente d’une Ong de défense des droits des femmes. Aujourd’hui encore, celle-ci maintient sa critique lorsque Prudencio a été remplacée à la tête de l’Inf.
Une présidente de l’Inf doit savoir rester mère et femme, et surtout réussir à adapter son univers à celui de la femme béninoise moderne. Cette dernière est assez anticonformiste ; elle est en quête de plus de liberté, de sensation, de goût, ce qui n’est pas toujours synonyme de dépravation.
La colère des activistes contre l’ex présidente doit servir à toutes celles qui prendront un jour la tête de l’Institut national de la femme. Une présidente de l’Inf doit savoir rester mère et femme, et surtout réussir à adapter son univers à celui de la femme béninoise moderne. Cette dernière est assez anticonformiste ; elle est en quête de plus de liberté, de sensation, de goût, ce qui n’est pas toujours synonyme de dépravation.
Ne pas perdre de vue aussi, qu’en face de cette jeunesse féministe se dresse également un autre camp de femmes modérées qui, quoique séduites par les discours de promotion des droits des femmes, restent prudentes et n’hésitent pas à crier à la dépravation des mœurs.
Les nouvelles autorités de l’Inf trouveront le génie de travailler à satisfaire les différents camps, afin que toutes les femmes béninoises jouissent des conditions matérielles et psychologiques nécessaires à leur contribution au développement.
Par S. B. AGBON
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