Oswald Homeky n’est plus membre du gouvernement. Le ministre des Sports a pris de court l’opinion en démissionnant vendredi 6 octobre. Dans la même journée il a passé service à son (ex) homologue de l’Énergie, de l’eau et des mines, Samou Adambi comme intérimaire.
Par Sêmèvo Bonaventure AGBON
La cérémonie de passation de service s’est déroulée à huis clos et l’opinion quête toujours les raisons de cette sortie surprenante du gouvernement, à moins de trois ans de la fin du second mandat du président Patrice Talon dont il est l’un des fidèles alliés. Depuis, les commentaires vont bon train. Certains peinent à croire la version de la brouille entre lui et le chef de l’État. Et préfèrent mettre cette démission du ministre des sports dans le panier des calculs en vue de la présidentielle de 2026. Patrice Talon étant en train d’égrener son dernier mandat constitutionnel. Oswald Homeky est l’un des rares visages qui jouissent d’une bonne réputation au sein de la population, du camp présidentiel et dont une éventuelle candidature en 2026 pourrait rassembler.
Même si, dans une récente sortie, Oswald Homeky a plutôt désigné Olivier Boko, l’homme d’affaires et ami personnel du président de la République, comme le plus aguerri pour briguer la magistrature suprême à la suite de Patrice Talon. À en croire le web média Banouto, ces propos seraient d’ailleurs à l’origine d’une colère du président contre son ministre. Celui-ci lui aurait reproché de s’écarter ainsi de l’esprit de la réforme phare du système partisan.
Des succès …
Oswald Homeky est entré au gouvernement en 2016 comme ministre des Sports. Plus tard son portefeuille a été élargi à deux autres départements stratégiques : le tourisme et la culture. Il les perdra en 2019 à l’occasion d’un remaniement ministériel. Oswald Homeky fait partie des jeunes promus aux postes clés par Patrice Talon.
En sept ans de présence au gouvernement, Oswald Homeky n’a pas fait piètre impression à la tête des différents départements qu’il a occupés. À la Fédération béninoise de football (Fbf) où sévissait une grave crise interne, il a réussi à ramener l’ordre avec l’élection d’un nouveau comité exécutif, le 25 août 2018, dirigé par l’opérateur économique Mathurin de Chacus.
Oswald Homeky a usé de sa perspicacité pour concrétiser la vision du chef de l’État dans son secteur. Il a fait de la planification le secret du rayonnement des sports à l’ère du gouvernement de la Rupture. «…J’avais annoncé que les performances de nos équipes, les succès de nos athlètes ne dépendraient plus du hasard, mais seraient le couronnement logique d’une bonne organisation, de la bonne préparation de nos athlètes et des investissement massifs que nous aurons consenti dans le secteur».
Cette planification a pris en compte le volet infrastructures, avec la construction de 22 stades communaux sur toute l’étendue du territoire national avec chacun une capacité de 3000 places dont 1000 places couvertes; l’implication du secteur privé dans le financement du sport à hauteur de 1/1000 de leur chiffre d’affaires avec la possibilité d’être propriétaires ou co-propriétaires des clubs, des organisations qui animent le sport dont «la Soneb qui s’investit dans la natation, la Cnss qui s’investit dans le handball, le Port autonome dans le foot et dans le basketball, la Lnb qui conduit un très bon projet dans le football, et plusieurs autres sociétés privées qui investissent dans le tennis, la pétanque.», a-t-il illustré en mai 2020 sur l’émission « Le temps des moissons ».
Sous le ministre Oswald Homeky, le Bénin a accueilli en septembre dernier deux événements sportifs majeurs: l’organisation de la coupe du monde de pétanque 2023 et la Can Maracana 2023 à Grand-Popo. En 2021, c’était la finale de la Confédération africaine de football (Caf) au stade Général Mathieu Kérékou alors rénové à la facture de 13 milliards de Fcfa. La rencontre remportée 2-1 par Raja Club Athletic de Casablanca (Maroc) face au club algérien de la Jsk signait la renaissance infrastructurelle du Bénin en matière sportive.
L’existant était tombé en désuétude, ce qui justifiait les vastes programmes lancés par le gouvernement. En accueillant la finale de la Caf 2021, « C’est pour montrer à la face du monde que le Bénin a une belle infrastructure », témoignait justement le sud-africain Patrice Motsepe, président de la Caf.
Le passage d’Oswald Homeky à la tête du ministère des Sports reste aussi marqué par la performance historique des ex Écureuils qui se sont qualifiés pour les quarts de finale à la Can de football Égypte 2019. Enfin, choisi par ses pairs Oswald Homeky a par ailleurs, présidé la Conférence des ministres de la jeunesse et des sports de la francophonie (Confejes)
« Contrairement aux armes de destruction massive, le sport est une arme de construction massive. Si la jeunesse est bien prise en compte, il y aura la paix dans le monde » a-t-il déclaré mercredi 5 juillet 2017 à la 28ème session annuelle du Cran Montana Forum en Espagne sur le thème : La jeunesse au service de la paix, vers une nouvelle gouvernance du sport.
…et des ombres
Mais les succès d’Oswald Homeky ont été entachés quelques fois par des tragédies. Dans le cadre de la cinquième journée des éliminatoires Can Côte d’Ivoire 2023 les Guépards ont frôlé le hold-up face aux Lions de la Téranga en accrochant un précieux nul, 1 but partout au stade Général Mathieu Kérékou de Cotonou. À 15min du démarrage du match, l’une des entrées secondaires du stade surveillée par 5 policiers et trois stadiers n’a pas échappé à la puissance collective. Deux supporters béninois ont ainsi trouvé la mort et plusieurs autres ont été blessés ce samedi 17 juin. Deux commissions d’enquête ont été alors mises en place dont l’une par le ministre Oswald Homeky, le 19 juin 2023. À ce jour, les conclusions se font attendre.
Dirigée par le conseiller Jean-Marc Adjovi Boco, cette commission est aussi instruite de se pencher sur la récurrence des difficultés liées à la gestion des flux humains lors des matchs internationaux. Le drame du samedi 17 juin rappelle aussi celui du 24 mars 2019 où les équipes du Bénin et du Togo se sont affrontées à Cotonou dans le cadre des éliminatoires de la Can 2019. Une bavure policière avait fait deux morts et plusieurs blessés.