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L’écrivain et dramaturge béninois Ousmane Alédji de nouveau en librairie avec « La tragédie du roi Césaire et Négrititudes », « Remember Rwanda » et « Comment organiser un festival international : cas du plus grand festival de théâtre d’Afrique ». Trois ouvrages publiés chez les Éditions Béninlivres et lancés samedi 4 novembre au Centre culturel Artisttik Africa d’Agla à Cotonou.
On le savait fou amoureux d’Aimé Césaire, le poète et homme politique martiniquais. Ousmane Alédji, promoteur d’Artisttik Africa l’assume à travers « La tragédie du roi Césaire et Négrititudes », pièce théâtrale en deux volets : « La tragédie du roi Césaire » et « Négrititudes ».
La première est donc inspirée de la célèbre pièce d’Aimé Césaire, « La tragédie du roi Christophe ». La seconde, elle, « nous rappelle le célébrissime mouvement de revendication des Noirs [la négritude, ndlr]après la seconde guerre mondiale», souligne Nounangnon Bidouzo, docteur en Littérature africaine.
« La tragédie du roi Césaire » fait 48 pages réparties en 6 mouvements. Elle plonge le lecteur dans un contexte de guerre et met en jeu deux personnages majeurs. Césaire et Hounto Sonon Danwegniagbessé. Dans cet ouvrage, « Le roi Césaire, malgré le poids de l’âge, l’infirmité et la maladie, s’efforce de ramener à l’ordre son peuple représenté par son aide de camp, Hounto.
Refusant d’admettre la férocité de ses adversaires dont la puissance des moyens a visiblement décimé leur troupe, le roi Césaire s’efforce de s’accrocher à la vie et se donne pour obligation morale d’inculquer à son peuple le sens de l’engagement, le devoir de la résistance » résume la présentatrice. Entre déni et rage, Césaire réussit à partager avec ce peuple vaincu, quelque peu déçu, sa fougue, sa fierté d’être nègre.
« La tragédie du roi Césaire n’est pas trop loin de la tragédie du roi Christophe » compare Nounangnon Bidouzo. Alors, « pour connaitre Alédji, il faut connaitre Césaire. Pour comprendre Césaire, il faut lire Alédji » a-t-elle exhorté.
« Negrititudes », s’inscrit dans la même dynamique que la tragédie du roi Césaire. Mais ici, il s’agit plutôt d’un monologue. Seul le roi Césaire est convoqué. « Toute la philosophie d’Aimé Césaire est déroulée, déballée… » par Ousmane Alédji qui lance un appel à la jeunesse africaine. « L’heure d’aller au rendez-vous avec nous-mêmes a sonné ».
Quant à “Remember Rwanda”, il s’agit d’un recueil de 87 pages, 5 nouvelles. La première nouvelle de ce recueil porte sur la justice des hommes. « L’inconséquence dans les actes et gestes », commente le présentateur Chrys Amègan, chroniqueur littéraire et auteur, lui aussi, du recueil 60 millions.
Cette nouvelle met l’accent sur une adolescente de 16 qui s’est retrouvée au tribunal et en passe d’être condamnée pour avoir trempé sa chatte dans un récipient rempli d’eau froide pour tester l’instinct de suivi de la bête.
« À quelques minutes du prononcé du verdict qui devait l’écrouer pour un bon moment, elle sort un vieux journal où l’on voit une photo d’hommes, de femmes et d’enfants emprisonnés sous une avalanche de neiges encerclés par un mur de barbelés en acier coupant », relate Chrys Amègan.
Par ce geste, l’adolescente entend interpeler la conscience du juge. « Si vous voulez me condamner pour avoir mouillé ma chatte, expliquez-moi ce qui se passe sur cette photo. Dites-moi d’abord si c’est comme cela que vous traitez vos semblables, si c’est ainsi que vivent les hommes. Le procureur qui s’échine pour m’envoyer en prison a appris le code pénal par cœur. Mais qu’il m’explique ce que ces hommes, femmes et enfants sur ce journal ont fait pour être ainsi traités ».
La suite… Chrys Amègan renvoie le public à aller découvrir la réaction du juge et les autres nouvelles en lisant l’ouvrage.
Organisation de festival
« Comment organiser un festival international : cas du plus grand festival de théâtre d’Afrique ». Ce dernier livre du trio d’Ousmane Alédji constitue un essai. L’auteur donne des astuces pour l’organisation d’un festival réussi. Au nombre de ces secrets, l’effacement de soi (ne pas se mettre devant plus que le festival lui-même) et le financement, note Tanguy Agoï, journaliste et chroniqueur littéraire .
Mais précise-t-il, le financement n’est pas forcément de l’argent mais plutôt l’accompagnement, qui n’est rien d’autre que les hommes. L’auteur aborde également dans le livre l’histoire du Festival international de théâtre du Bénin (Fitheb) dont il a été directeur général de février 2014 au 25 septembre 2015.
Ce festival, définit l’auteur, est un marché où on vient acheter. On y achète la formation, la production et la commercialisation. « La formation parce qu’un festival apporte un plus aux acteurs présents. De commercialisation parce qu’il y a des acteurs qui vous proposent des choses, qui mettent en place des produits qui intéressent le public. Et quand on parle de public, on doit parler de production », renchérit Tanguy Agoï.
«Recycler les mêmes erreurs…»
Présent dans le public, l’écrivain Habib Dakpogan a salué le retour de l’auteur dans l’univers des nouvellistes béninois « après une si longue absence ».
Sur les différents sujets abordés par l’auteur, il a cherché à savoir quel en est le but surtout qu’ils collent avec l’actualité au Bénin et dans le monde. « Les ouvrages, j’ai une bonne dizaine dans mon ordinateur. Eskil Agbo à travers les Éditions Béninlivres, a lu quelques uns de ces ouvrages et a trouvé qu’il y en a qu’il faut remuer et faire connaitre à l’opinion », répond l’auteur.
Cependant, Remember Rwanda renvoie au génocide notamment le cas du Rwanda en 1994 et ayant fait jusqu’à 800 000 morts. « Vous avez totalement raison », réagit Ousmane Alédji. Justifiant les raisons de cet ouvrage, il a fait savoir que « l’esprit humain a cette faiblesse qu’il finit par recycler les mêmes erreurs, les mêmes abominations ».
Ces « abominations, se désole-t-il, nous n’en tirons pas les leçons pour les éviter ». « On a même l’impression que quelque chose d’irréversible nous amène vers cela », a-t-il regretté. Alors «C’est le moment de revisiter cela avec la gravité qu’il faut pour que nous ayons peur un jour de repasser par-là ».
Par Raymond FALADE