La promotrice du Salon Afrique unie, Urmine Gounongbé n’est pas déçue de la 1ère édition hors de France que le Bénin a accueilli du 9 au 11 novembre. Elle estime toutefois « qu’il y a un travail à faire de [leur] côté » pour avoir un meilleur impact et de meilleurs résultats. Urmine Gounongbé appelle par ailleurs la jeunesse béninoise à «sortir» et à «ne pas se dire que l’avenir est ailleurs». Entretien.
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Bénin Intelligent : Le Salon Afrique unie (SAU) s’est achevé samedi 11 novembre. Quel bilan faites-vous du déroulement des activités ?
Urmine Gounongbé, Ceo du SAU : Avant de vous parler du bilan global du Salon Afrique unie, déjà on remercie la Chambre de commerce et d’industrie du Bénin et les autorités béninoises qui ont permis la tenue de cette 6e édition du Salon Afrique unie, la première en Afrique.
Alors en termes de bilan, on peut dire qu’on est peu satisfait du déroulé de la 6e édition du Salon Afrique unie. Parce que ça n’a pas été facile. Quand on compare les 5 premières éditions en France, l’organisation était plus fluide. Alors qu’au Bénin, c’était très compliqué de mobiliser à la fois les entreprises, les institutions et la population.
Peut-être parce que c’est un premier événement du genre qui vient à Cotonou donc on ne sait pas de quoi il s’agit. On l’a peut-être confondu avec un événement politique parce que ça s’appelle le Salon Afrique unie, alors qu’on est vraiment sur du business et sur comment les acteurs afro descendants se mettent ensemble pour œuvrer au développement économique du continent.
Et donc je pense qu’il y a un travail qu’on doit faire dans ce sens pour montrer aux gens que ce n’est pas un événement politique, mais un événement apolitique qui n’est là que pour du business.
Le Bénin est un pays d’opportunités. C’est-à-dire quand on compare avec certains pays de la sous-région, et quand on remonte à il y a quelques années.Par exemple, moi je suis béninoise de la diaspora. Il y des béninois de la diaspora et pas forcément hors de l’Afrique qui ont envie d’investir au Bénin. Il y a même des gens de la diaspora qui ne sont pas des béninois qui ont envie d’investir dans des pays en Afrique. Et on s’est rendu compte qu’aujourd’hui, le Bénin donne envie du moins de venir s’y implanter.
Dans l’ensemble, si on enlève tous ces points, on a quand même pu faire un bel événement. On a attiré du monde. Maintenant il faut mobiliser un peu plus et faire plus connaitre l’événement aux populations africaines et béninoises en particulier.
Parlant de mobilisation, quel accueil les autorités politico-administratives ont-elles réservé au Salon Afrique Unie dont la première édition en Afrique s’est déroulée au Bénin ?
Nous avons initié dès 2022 un partenariat avec la Chambre de commerce et d’industrie du Bénin (Ccib) qui a d’ailleurs accepté de porter le salon avec nous quand nous sommes venus la voir. On a commencé à travailler avec la Ccib. On a ensuite rencontré l’APIEx avec laquelle on a noué également un partenariat.
Après, pour nous de la diaspora, quand on vient et qu’on travaille avec des institutions qui veulent porter nos projets avec nous, on pensait vraiment que ça allait se faire à quatre mains ou à plusieurs mains.
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Mais on s’est rendu compte qu’on a eu à porter beaucoup plus le projet qui était assez difficile. Parce qu’on a mobilisé des acteurs de la diaspora de l’Europe qui souhaitaient justement s’installer au Bénin. On pensait que ça allait plus mobiliser les institutions.
Mais c’est aussi peut-être parce que nous n’avons pas su expliquer l’idée du projet. Peut-être que nous n’avons pas su convaincre nos partenaires. C’est pourquoi je disais qu’il y a un travail à faire de notre côté. Parce que pour moi, un pareil événement qui vient mettre en lumière, l’attractivité du Bénin, la richesse du Bénin, les opportunités d’investir au Bénin, devrait être beaucoup plus porté par ces institutions-là qui ont certes joué le jeu, mais pas autant qu’on l’espérait. Mais on verra pour les prochaines éditions dans d’autres pays.
Vous n’êtes pas trop déçue ?
Pas vraiment, non ! Pas déçue. Je ne vous le cache pas, ça a été très difficile dans l’organisation, la mise en place, la mobilisation comme je vous l’ai dit. Mais il n’y a pas de déception, en tout cas pas de la part de ces autorités. Mais peut-être dans la mobilisation. Parce qu’on aurait aimé que pendant ces trois jours, que la population, les entrepreneurs, les jeunes sortent.
Il y a certes eu du monde. Les jeunes ont participé aux panels et workshops. Mais on s’attendait à plus de la part de la population béninoise.
Quelles sont les activités phares qui ont marqué cette édition du Salon Afrique Unie ?
Nous avons eu plusieurs panels. Notamment dans le domaine de l’agrobusiness. Nous avons fait venir des acteurs du Sénégal, de la Guinée et d’autres pays pour partager leurs expériences dans l’agrobusiness. L’idée de ces panels était de mettre ensemble les entrepreneurs et investisseurs de différents pays pour partager des expertises. Voir ce qui se passe bien au Sénégal, et voir si on peut le dupliquer au Bénin. Ce qui se passe bien au Bénin, voir si on peut le dupliquer au Togo.
C’est pour cela que dans le cadre du Salon Afrique unie, on fait venir des intervenants, des investisseurs, des entrepreneurs de différents pays pour pouvoir échanger, réseauter et partager leurs expertises.
Il faut également sortir. Parce que la jeunesse béninoise ne sort pas.
Nous avons également eu un panel dans le domaine de la santé. Parce que la santé est très importante au niveau de l’Afrique. Et il faut que les acteurs se mobilisent pour partager les expertises, les mutualiser.
Ensuite nous avons eu un panel dans le domaine de la formation professionnelle et les métiers d’avenir. Parce que comme vous le savez, les jeunes constituent le poumon, la force économique de notre continent. Et il est important pour nous dans le cadre du Salon Afrique unie qu’on puisse détecter aujourd’hui les métiers d’avenir pour pouvoir orienter nos jeunes vers des formations professionnelles pour qu’ils puissent être aptes dans 2, 3, 4 ans à répondre aux besoins des entreprises.
Un panel également dans le domaine du numérique et l’intelligence artificielle. Un panel dans le domaine du sport. Parce que la structuration du sport en Afrique est un marché gigantesque et il faut justement que les africains, les afro descendants en prennent conscience en se disant que le sport n’est pas que ludique. Il y a le sport ludique, mais il y a le sport business et il faut structurer ce secteur. On a d’ailleurs eu sur ce panel monsieur Jimmy Adjovi-Boco [conseiller technique du ministre des Sports, ndlr].
En parallèle des panels, on a eu des workshops. Ce sont des ateliers mis en place pour que les experts dans leur domaine puissent échanger et partager leur expertise avec les participants. On en a eu sur différentes thématiques.
Il y a eu aussi l’espace exposant qui était derrière l’esplanade de l’Amazone où s’étaient réunies différentes entreprises venant de différents pays pour pouvoir montrer leurs offres, leurs services et les opportunités.
Au cours des panels et ateliers, il y a eu des diagnostics et des propositions. Que deviennent ces différentes propositions ?
Pour ne pas aller dans tous les sens, je vais me baser sur le panel qui a été fait par exemple sur le secteur de la santé. Quand on voulait faire cette 6e édition au Bénin, on ne voulait pas faire un salon pour faire un salon, faire un panel pour faire un panel. Notre idée c’était de partir des constats et de voir maintenant de manière concrète, ce qui a été mis en place et ce qui va être mis en place.
C’est d’ailleurs pour cela que dans le cadre du panel sur la santé, on a fait venir le docteur Daniel Biakou qui est le seul africain qui installe des laboratoires pharmaceutiques. Ce monsieur avec son expertise, souhaite s’implanter dans un pays en Afrique. Nous nous sommes dit : comme le Bénin offre des opportunités, pourquoi ne pas le faire venir pour partager non seulement son expertise, mais voir si le Bénin correspond au pays dans lequel il veut implanter sa structure. Nous espérons bien que cela va se concrétiser.
Donc quand on prend le panel de la santé, voilà quelque chose de concret. Un expert qui vient partager son savoir-faire, mais qui a aussi un besoin d’investir, de business. Et en même temps pouvoir le faire dans le pays qui accueille le salon. Et c’est l’idée derrière chaque panel. C’est-à-dire, faire le bilan, voir concrètement ce qui est mis en place dans le pays.
Nous avons également eu un panel dans le domaine de la santé. Parce que la santé est très importante au niveau de l’Afrique. Et il faut que les acteurs se mobilisent pour partager les expertises, les mutualiser.
Quand on prend l’exemple de la formation professionnelle, on s’est rendu compte que le Bénin met le focus sur la formation professionnelle des jeunes. Parce que pour le Bénin, envoyer tout le monde en formation généraliste n’est plus d’actualité. Parce qu’on a besoin de personnes qui puissent faire de l’alternance, puissent faire des stages dans des entreprises et pouvoir être adaptées aux métiers.
Et donc ce panel a été mis en place pour pouvoir converger avec la stratégie que le Bénin est en train de mettre en place dans le domaine de la formation professionnelle pour voir aujourd’hui les métiers de demain. Parce qu’on nous parle de l’industrialisation, de la transformation de nos matières premières.
Mais personne ne se pose la question de savoir si le Bénin est prêt à, d’ici 3 ans, mettre sur le marché des techniciens, des ingénieurs. Donc c’est maintenant qu’il faut faire le point, les former et pouvoir répondre dans 3, 4 ans à ces demandes et non faire venir encore des experts comme on a l’habitude de le faire.
En annonçant le Salon Afrique unie, vous disiez que le choix a été porté sur le Bénin parce que c’est un pays d’opportunités. Après quelques jours au Bénin dans le cadre du Salon, maintenez-vous cette version ?
Tout à fait. Le Bénin est un pays d’opportunités. C’est-à-dire quand on compare avec certains pays de la sous-région, et quand on remonte à il y a quelques années.
Par exemple, moi je suis béninoise de la diaspora. Il y des béninois de la diaspora et pas forcément hors de l’Afrique qui ont envie d’investir au Bénin. Il y a même des gens de la diaspora qui ne sont pas des béninois qui ont envie d’investir dans des pays en Afrique. Et on s’est rendu compte qu’aujourd’hui, le Bénin donne envie du moins de venir s’y implanter.
Après, je ne connais pas non plus les détails. Est-ce aussi facile, je ne peux pas vous le dire. Mais du point de vue de la diaspora, on a envie de venir investir au Bénin. Parce qu’on se rend compte que le pays est attractif, il offre des opportunités et c’est le moment de venir. Maintenant, concrètement ce que ça va donner, je n’en sais rien. Je ne l’ai pas encore expérimenté. Donc je crois les autorités béninoises quand elles nous disent que le pays offre des opportunités.
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On a d’ailleurs visité avec le comité, les journalistes et les personnes de la diaspora qui étaient à ce salon, la Zone économique spéciale de Glo-djigbé, la Gdiz. On s’est rendu compte qu’il y a quand même pas mal de choses qui se font. Le rôle du Salon en fait c’est ça. C’est comment on met en valeur le pays hôte. Comment on met en valeur les infrastructures, comment on met en avant les opportunités de business. Comment on peut montrer que le climat des affaires au Bénin est plus rassurant et donne envie de s’y implanter.
Avant la prochaine édition du Salon qui se tiendra certainement dans un an, quelle est la prochaine étape ?
La prochaine étape c’est le repos. Parce qu’on est crevé. Je ne vous cache pas, ça a été dure. Mais on l’a fait. On est allé au bout. Donc je pense que la prochaine étape c’est déjà le bilan.
Un panel dans le domaine du sport. Parce que la structuration du sport en Afrique est un marché gigantesque et il faut justement que les africains, les afro descendants en prennent conscience en se disant que le sport n’est pas que ludique. Il y a le sport ludique, mais il y a le sport business et il faut structurer ce secteur.
C’est qu’on se pause. Qu’on regarde ce qui a marché, ce qui n’a pas marché. Là où on n’a peut-être pas convaincu, sur quel axe on doit retravailler pour pouvoir faire quelque chose de mieux les prochaines fois et dans quel pays. Je pense qu’il nous faut ce moment où l’équipe va se réunir et faire le bilan. Et à partir de là, on pourra revenir vers vous pour vous donner les pistes et les orientations à venir.
Avez-vous un message à l’endroit des participants et des autorités ?
Oui ! Le message que j’ai particulièrement c’est que la jeunesse béninoise doit croire en ses rêves, doit se dire que c’est possible, doit se dire que quand on a envie de faire quelque chose, il faut aller jusqu’au bout.
Je vous l’ai dit, faire ce salon a été très difficile. Mais on est allé jusqu’au bout. Je ne dis pas que tout a été parfait. Mais on a tout mis en œuvre pour faire quelque chose de qualité.
Ce que je veux dire en fait c’est que quand des porteurs de projets, que ce soit au Bénin ou dans d’autres pays en Afrique croient en leurs projets, il faut qu’ils se donnent les moyens et ne pas forcément attendre que ça vienne. C’est-à-dire, il faut enclencher. Et je pense que si on enclenche et qu’on met tout en œuvre, il y a forcément quelqu’un qui verra cet effort et pourra y contribuer. Donc ne jamais baisser les bras.
Il faut également sortir. Parce que la jeunesse béninoise ne sort pas. Je ne sais pas si vous l’avez constaté. Au niveau des stands de l’espace exposant, il y avait du monde mais je pense qu’il aurait pu attirer beaucoup plus de foule. C’est peut-être aussi notre faute. Peut-être qu’en matière de communication on aurait pu faire mieux vu qu’on n’avait pas beaucoup de budget. On a fait ce qu’on a pu.
Mais ce que je veux vraiment, c’est que la jeunesse béninoise se dise que c’est possible. Ne pas se dire que l’avenir est ailleurs, non ! L’avenir est au Bénin ou en Afrique tout au moins. Parce qu’on peut être béninois et aller investir au Togo. On peut être togolais et aller investir au Sénégal. C’est dure, mais il faut croire en ses rêves et se battre pour.
Merci !