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Minusma : Un départ qui hypothèque l’avenir des mécanismes sécuritaires multilatéraux ?

Par Arnauld KASSOUIN
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Quel avenir pour la coopération internationale dans la lutte anti-terroriste au Mali ? Le départ de Barkhane et le non renouvellement de la Minusma suscitent réflexion et polémique. Alors que d’autres invitent à concilier politique sécuritaire et développement, certains pensent à une reprogrammation des mécanismes sécuritaires multilatéraux. Toutefois, la posture de la realpolitik prime sur toutes les options.

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Sur le plan diplomatique, institutionnel et de la coopération de lutte contre les menaces terroristes, les Etats usent très souvent de deux principaux leviers. On a entre autres l’action individuelle ou unilatérale et la coopération internationale. C’est en droite ligne de cela que l’on verra se mettre en place au Mali, un ensemble d’instruments. Mais invariablement et primordialement de facture militaro-sécuritaire et répressive. Ayant pour but de pallier et de renforcer l’action sécuritaire de l’Etat en confrontation armée. Depuis 2007, contre divers acteurs et militants armés qui lui conteste, de manière plus ou moins réussie, l’exercice du monopole de la violence légitime. Puisque, la violence est de façon classique, un des moyens de produire de l’autorité et de la légitimité. Au sens bien sur de l’approbation de celle-ci par d’autres autorités (G. Jacobo et L. Grandmaison, 2019).

Dans la lutte contre le terrorisme, la coopération internationale est sensée favoriser l’acquisition de « moyens » susceptibles de renforcer la lutte contre le phénomène du terrorisme et de son éradication. Comme, on peut le lire dans « Terrorisme et sécurité internationale » de Y. Jeanclos et de S. Kirschbaum. Dans ce cas, « le rôle normatif des Nations Unies dans la lutte contre le terrorisme » qui est « ancré dans le droit international et les principes qui guident l’ordre mondial » ne doit pas étonner. Rappel de Seydou Kanté, fondateur de l’institut de géopolitique et de géostratégie.

Cependant, il est à noter que l’efficacité des dispositifs internationaux de lutte contre le terrorisme au Mali, principalement la Minusma et Barkhane, suscite, une intense controverse. Aujourd’hui, elle alimente un vif débat politique et académique sur la fonction pacificatrice des instruments de coopération internationale. Ce qui d’ailleurs a souvent conduit au Mali et ailleurs, à la dénonciation de certaines forces internationales. Suspectées des fois d’être en collusion avec ou en lien avec certains mouvements armés non conventionnels.

Taxés comme ce fut le cas de Barkhane de servir de « bouclier protecteur » pour certains acteurs armés qualifiés de « terroristes », (Alhassane Gaoukoye, Conspiration au Mali et au Sahel, Paris, L’Harmattan, 2018, p.16). Ces suspicions ont amené, dans le cas du mali à la dénonciation des cadres et régimes internationaux communs. De lutte contre le terrorisme et de la violence extrémiste. Ce qui s’est soldé enfin par le retrait définitif de coopérations qui liaient ce pays à la communauté internationale. (Départ de barkhane le 15 août 2022, le retrait du Mali du G5 sahel. Et le non renouvellement du mandat de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (Minusma). Dans la lutte contre le terrorisme au Mali, il existe plusieurs types de mécanismes sécuritaires multilatéraux. Mais ce qui alimente le plus de débat a trait à la coopération occidentale dans la lutte contre le terrorisme.

Au Mali, la coopération internationale à l’épreuve

Les « controverses » observées dans la diplomatie militaire occidentale « sont multifactorielles » relève Gabriel Poda, consultant politique. Bien que les mécanismes sécuritaires multilatéraux soient mis en place, contre les groupes armés terroristes, leur impact est très limité. A cause des mobiles telles que : leur mandat, leur coordination et leur efficacité.

Toutefois, il est important de rappeler qu’ils étaient (mécanismes sécuritaires multilatéraux) assujettis à diverses missions. « Ce sont des mécanismes internationaux totalement différents. Qui, dans l’idéal, se voulaient pourtant très complémentaires » renchérit Hervé Briand, senior sahel analyst. « De plus, les changements brutaux de régimes n’ont pas permis de créer des espaces de coopérations utiles. Surtout dans des contextes de fragilités sécuritaire » indique l’enseignant en géopolitique Régis Hounkpè. Les conclusions du rapport Brahimi (2000) ,la « doctrine Capstone » (2008). Et du rapport Hippo (2015) réitérés par Antionio Guterres abondent dans le même ordre idée. « Une paix durable est accomplie non pas à travers des engagements militaires ou techniques. Mais à travers des solutions politiques » indique le secrétaire général des nations unies. Plus loin, ce dernier évoque l’alternative à un processus politique que peut constituer les Opérations de maintien de paix. Après tout, « le terrorisme surfe sur des inégalités politique » affirme l’analyste Maixent Somé.

En effet, concernant la Minusma, « il faut être clair et ne pas lui faire de mauvais procès » argumente Hervé Briand. Elle n’a jamais eu comme objectif d’être une force militaire de lutte active contre le terrorisme comme le prévoyait explicitement son mandat. Il s’agissait d’une force internationale de maintien de la paix (casques bleus). Avec, en corollaire, pour mission la facilitation du processus de mise en œuvre de l’Accord pour la Paix et la Réconciliation d’Alger (Apr). La Minusma devait exercer « les activités de bons offices. De renforcement de la confiance, de facilitation du dialogue. De médiation du Représentant spécial du Secrétaire général aux niveaux national et local » défend Bertrand Ollivier, chercheur pour le bureau régional d’Afrique de l’Ouest de l’Onudc.

Les groupes terroristes se jouent de la porosité des frontières

Mais le départ de Barkhane, et de la Minusma acte-il la fin de la coopération occidentale dans la lutte contre le terrorisme ? Je ne pense pas. Puisqu’en dehors de barkhane et de Minusma, les Etats unis, la Turquie et plein d’autres partenaires conversent avec les autorités maliennes. D’ailleurs, faut-il rappeler que le terrorisme est une menace mondialisée ? Non ! Les groupes terroristes se jouent de la porosité des frontières. Et une coordination transfrontalière est indispensable pour contrer cette stratégie. De même, ces groupes armés terroristes bénéficient du soutien de réseaux internationaux pour mener ses activités. Raison de plus pour considérer l’ampleur de la menace au sein des foyers aujourd’hui. Pour donc mieux la contenir, une action conjointe et solidaire s’avèrent indispensables.

L’extension de la menace terroriste sur le continent africain et même sur le territoire malien illustre parfaitement son aspect mondialisé. « Personne, ni aucun pays, fut-il puissant, n’est à labri de ce fléau mondial qu’est le terrorisme». Disait Issa Konfourou , ambassadeur. Représentant permanent du Mali auprès des Nations Unies à l’occasion de l’examen du point 112 intitulé « Mesures visant à éliminer le terrorisme international ».

« Le terrorisme est un phénomène mondial et un seul pays ou groupe de pays isolés ne peut y faire face seul dans son coin ». Argue à cet effet l’analyste en relation internationale Komlan Avoulete. Au Mali, la plupart des mécanismes sécuritaires internationaux sont appuyés par la coopération occidentale. A l’image de la Minusma, de l’Eutm, de Barkhane, du G5 sahel ou de l’initiative d’Accra. Sur la mondialisation de la menace terroriste dans le contexte malien, Hervé Briand réfute l’argumentation servie. Car, La menace est concentrée sur trois axes : le Jnim, l’Eis et les séparatistes Touaregs analyse l’ancien de la Dgsi.

Toutefois, compte tenu de la complexité et de la propagation rapide de la menace, le Mali a procédé à l’adoption de plusieurs lois. Dont celle relative à la répression du terrorisme ( loi n° 08-025 du 23 juillet 2008 ) et de la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme ( loi n° 008 du 17 mars 2016 ) conformément à l’agenda international. Alors pourquoi depuis l’avènement du Comité national pour le salut du peuple, une certaine forme de rupture avec la diplomatie militaire étrangère est-elle autant décrier ?

LIRE AUSSI: Hervé Briand, senior Sahel analyst « Il ne faut pas faire de mauvais procès à la Minusma»

Privilégié la coopération internationale et régionale

La raison est toute simple. L’avènement du président Assimi Goita à la tête du Mali en est pour beaucoup. Car celui-ci a opté pour une multipolarité de partenaires sur la scène internationale. Même si aujourd’hui la Russie figure comme seul partenaire privilégié sinon principal de la scène internationale dans la lutte contre le terrorisme au mali.

« La présence de la Russie au Sahel renforce la multipolarité dans la région, où plusieurs acteurs internationaux sont déjà engagés, notamment la France, les États-Unis, l’Union européenne, l’Onu, et d’autres » objecte l’analyste Seydou Kanté. Cette multipolarité n’est pas la bienvenue pour tous. Car pour certains, elle chercherait à capitaliser sur ses nouvelles popularités en Afrique pour mieux dissimuler son isolement depuis le début de la guerre en Ukraine. Le rapprochement du mali de cet acteur de la scène internationale n’est pas sans risque. Dépendre de lui comporte « des risques liés à la dépendance envers un acteur dont la position sur la scène internationale est marquée par un isolement croissant sur certains aspects structurants des affaires mondiales » indique Gabriel Poda.

Aussi, faut comprendre que cette proximité née manu militari entre le mali et la Russie est intéressée. Pour Hervé Briand, ce choix est plus opportuniste que stratégique. Dans la lutte contre le terrorisme, privilégié la coopération internationale et régionale sont tout aussi « nécessaires et indispensables ».

Nécessité de réorienter la coopération internationale occidentale

Eu égard du « rôle crucial dans le renforcement des capacités » des forces de défense et de sécurité que peut jouer la coopération internationale surtout celle occidentale, Seydou Kanté propose que cette dernière soit de plus en plus coordonnée et reliée aux stratégies nationales de chaque pays du Sahel. Ce que n’approuve pas Gabriel Poda en raison du contexte politique exigu dans lequel se retrouve le Mali aujourd’hui. « Il est difficile de préconiser un protocole d’initiatives dans ce cas de figure ». Toutefois, toute « coopération internationale au Sahel doit prendre en compte que le développement et la sécurité sont bien liés, et que l’élan de souveraineté et d’émancipation ne s’arrêtera probablement pas » insiste Hervé Briand.

S’appuyer donc sur la realpolitik, et des programmes “transparents” de coopération économiques et sécuritaires, à grande et petite échelle, devraient permettre d’aboutir à une meilleure implication de la coopération internationale dans la lutte contre le terrorisme au Mali. La révolution technologique en matière de diplomatie militaire, la présence militaires occidentales « pro-actives » parait aussi de plus en plus moins probable.

LIRE AUSSI: Bataille de Kidal : Goïta 1, rebelles touaregs 00

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1 Commentaire

A. Azizou novembre 21, 2023 - 1:31 pm

Rien que la paix ✊

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