L’Ong Changement social Bénin (CsB) a lancé officiellement, jeudi 30 novembre lors d’une conférence de presse à la salle de participation citoyenne d’Abomey-Calavi, la Quinzaine des droits humains. À l’occasion, l’organisation a présenté les résultats de ses différents travaux au titre de l’année 2023 en faveur des droits de l’homme.
Les droits humains en péril. 459 prisonniers sur 1055 interrogés sont toujours en détention provisoire, soit près de la moitié. « 79% ont déjà fait plus de 6 mois sans avoir été présentés à un juge ». La question « éternelle » de la surpopulation carcérale revient elle aussi. « A Lokossa où la capacité d’accueil est de 200 places, nous avons enregistré plus de 900 personnes incarcérées », dévoile Montesquieu Hounhoui.
Les sanctions disciplinaires vont de « l’isolement cellulaire avec entraves pour une durée indéterminée » aux « châtiments corporels. Des mesures « assimilables à des pratiques et traitements cruels, inhumains ou dégradants », relève le responsable du programme Justice pénale de CsB.
A tout cela s’ajoutent les conditions de vie et d’hygiène en situation de détention, le non-respect du droit à l’assistance juridique et judiciaire et la perte des dossiers de certains détenus. Ce sont là quelques maux du système carcéral en République du Bénin. Changement social Bénin (CsB) les a consignés dans son Rapport de monitoring des droits humains en milieu carcéral.
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Le rapport souligne également les conditions de détention des femmes enceintes et des nourrices, des personnes en situation de handicap. Tout n’est toutefois pas sombre. En considérant les informations du monitoring de 2021, CsB note une amélioration qualitative des rations servies en milieu carcéral. C’est du moins ce qu’ont confié les enquêtés, même s’ils « ont décrié ce qui se fait » sur la quantité.
Par ailleurs, le gouvernement et les institutions se sont engagé à poursuivre des actions pour l’amélioration de la situation des droits humains. En témoignent les diverses résolutions et recommandations du colloque sur la modernisation de la justice au Bénin. Entre autres, la construction de nouvelles prisons, centres de détention et maisons d’arrêt, la dématérialisation de la justice. A l’audience solennelle marquant la rentrée judiciaire 2023-2024 à la Cour d’appel de Cotonou, Justin Gbènameto, président de la Cour rappelait la vocation de la justice. Il a en effet déclaré que la profession de la justice « ne doit plus être considérée comme un service à rendre mais un devoir qui s’impose ».

Une année de réalisation
Du 13 avril au 15 juin, CsB a effectué ce travail de monitoring dans les 11 établissements pénitentiaires du pays. Une population de 1055 hommes et 101 femmes à raison d’au moins 100 personnes par établissement, constitue l’échantillon. La réalisation de ces travaux a pris en compte toutes les parties prenantes et également l’Agence pénitentiaire du Bénin pour une plus grande fiabilité des résultats.
Un rapport aborde spécialement ‘’La situation des femmes privées de liberté au Bénin’’. Un autre l’impact de la suspension des visites dans les établissements pénitentiaires. Cette dernière mesure serait toujours en vigueur alors qu’elle visait à limiter les risques de propagation de la Covid-19. L’organisation a également produit un rapport spécifique pour chaque établissement pénitentiaire.
2023 a donc été une année d’intense production pour l’Ong Changement social Bénin. Les droits humains étaient au cœur de chacune de ces réalisations. Des actions de monitoring relativement à la vie carcérale, aux législatives de janvier 2023 mais également au 4e cycle de l’Examen périodique universel du Bénin (Epu).
La séance de reddition du contenu des rapports lance officiellement la Quinzaine des droits humains. L’initiative est annuelle et propre à CsB. Elle colle à la célébration cette année, du 75e anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme (Dudh).

La quinzaine des droits humains
La quinzaine est l’occasion pour Changement social de se rendre disponible pour « porter l’essentiel du contenu de ces rapports au grand public », « dans une dynamique de redevabilité à 2e degré ». Ensuite « se rendre disponible dans la période pour des audiences de plaidoyers » en faveurs du respect et de la promotion des droits de l’homme, a indiqué Ralmeg Gandaho. Ces précisions du président du conseil d’administration de l’Ong dénotent de l’importance de la vulgarisation des dispositions de la Dudh.
« Nous sommes beaucoup plus dans la posture de porteurs de causes » a-t-il signifié. Changement social Bénin entend ainsi, travailler à faire savoir à l’opinion publique, mais également aux décideurs, ce qui se fait. Et relever le contraste avec ce qui devrait être. Elle se poursuit jusqu’à 10 décembre, jour de la célébration de la Dudh.
Pour Ralmeg Gandaho, le 75e anniversaire de la Dudh est « une célébration qui interpelle ». Notamment « sur le niveau d’assimilation de l’universalité des droits humains et de leur indivisibilité ». Il fait remarquer que « L’humanité humiliée au Bénin, est humiliée en France, est humiliée aux Etats-Unis, est humiliée au Japon ».
Rappelant la responsabilité de tous les acteurs et surtout des Nations unies, le président du conseil d’administration de CsB invite à être « humaniste dans la pensée, humaniste dans la parole, humaniste dans l’action ».
Changement social Bénin se dit conscient des défis relatifs à l’accessibilité du contenu de ces rapports pour les personnes « dites vulnérables ». Défis notamment liés aux barrières linguistiques et aux canaux de diffusions. L’organisation rassure des actions en cours pour y remédier.
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