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Le Vodun présenté à ma fille

“Le Vodun présenté à ma fille” : Les soutiens intellectuel et affectif de l’auteur, Dodji Amouzouvi

Par Sêdaminou Béni AGBAYAHOUN
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Accueil inégalable ! «Le Vodun présenté à ma fille », ouvrage pédagogique du professeur Dodji Amouzouvi, a mobilisé à son lancement, jeudi 15 mars à l’Université d’Abomey-Calavi, un parterre de sommités et une foule d’assoiffés de connaissances. Retour sur la dizaine d’interventions qui ont marqué les esprits.

«Avec toute la candeur, avec toute la virginité d’un enfant qui veut savoir, qui veut découvrir, elle m’a posé une série de questions et puis je me suis dit à quoi bon me limiter à elle seule ? Il faut offrir à tous ceux qui sont dans le même état d’esprit de soif de connaissances, de découverte, de compréhension du Vodun, notre spiritualité à nous, notre plumage à nous au Bénin et dans toute I’Afrique, il faut leur donner l’occasion de lire.»

Ces questions dont parle l’auteur, elles sont au nombre de 27. La fille de 10 ans qui les pose est, contrairement à son père-auteur, baptisée chrétienne. Toute la négativité qu’elle entend dire du Vodun et surtout l”’homélie visée” dont elle a subi la foudre le lendemain du sacre de son père dans le Sakpata l’ont poussé à emprunter le chemin de la connaissance du Vodun.

Qu’est-ce que le Vodun ? Qu’est-ce que le Fa, le Boo ? Quelle nuance entre le Bokonon et le Vodunnon ? Pourquoi le Vodun n’a-t-il pas de grands édifices d’adoration ? A instar de la croix ailleurs, le Vodun a-t-il des symboles ? Le Vodun a-t-il une communauté hiérarchisée comme dans d’autres religions ? Pourquoi dit-on qu’à la mort d’un fidèle, on lui prend le Vodun ? Quelles sont les lois du Vodun ? Où trouve-t-on encore le Vodun en dehors du Bénin ? Le Vodun est-il une religion ? Peut-on croire au Vodun et croire aussi à un autre Dieu ? Le Fâ ! C’est quoi ? et quelle relation y a-t-il entre le Vodun et le Fâ ? Qu’est-ce qu’un Vodun Djowamon et un Vodun Hundawassin ? Peut-on dire que le Vodun peut servir au développement ? Pourquoi les sanctuaires des Vodun sont souvent sales ? Et pourquoi représente-t-on le Vodun par une motte de terre ?

«Il y a 25 ans cela n’était pas possible à l’Uac»

Le professeur Mahougnon Kakpo, président du Comité des rites Vodun a lu ”Le Vodun présenté à ma fille” en moins d’une heure et demie. «La naïveté dans les questions et la simplicité avec laquelle le papa répond révèlent la portée didactique de ce livre», relève celui qui est par ailleurs professeur titulaire de littérature africaine.

Dans un Bénin où «le Vodun est assimilé à la méchanceté, la sorcellerie et la saleté», Mahougnon Kakpo et l’écrivaine Micheline Adjovi savent quelles critiques acerbes l’on affronte en assumant le Vodun ou en y consacrant sa plume. «Toutes les personnes que j’avais approchées pour préfacer mon roman Vodu, la forteresse d’espérance ont refusé. De même que ceux approchés pour le présenter lors du lancement, le 13 juillet 2019 à Ouidah. Parce que le titre dérange. Je me suis enfin tournée vers le professeur Dodji Amouzouvi. Il a répondu qu’il ne peut rien me refuser», a témoigné Micheline Adjovi.

Le Vodun présenté à ma fille

Toutefois, il y a matière à espérer, une avancée à saluer. «Pour moi, c’est une fierté de voir et de célébrer le Vodun à l’université. Il y a 25 ans cela n’était pas possible à l’Uac. Parce que même prononcer le nom Vodun, le mot Fa ce n’était pas possible. C’est pour cela que je voudrais saluer le comportement anti conformiste du professeur Dodji que j’ai rencontré ici à l’Uac», ajoute Mahougnon Kakpo.

«Lorsque j’ai publié Introduction à une poétique du Fa des collègues disaient : on va encore parler du Fa à l’Uac ? Qu’est-ce que Kakpo fait ? Il n’a qu’à rester chez lui et faire ça. (…) En 2017, j’ai publié Les épouses du Fa que j’ai fait préfacé par le Feu Père Jacob Agossou. Il y a eu des critiques : des gens ont dit comment un grand prêtre peut préfacer un livre sur le Fa ? Alors qu’ils ne l’ont pas lu. Lorsque le livre a été mis au programme, il y a eu des critiques. Certains ont refusé de l’acheter à leurs enfants. Alors qu’ils ne l’ont pas lu.»

Mahougnon Kakpo dénonce comme à son habitude, l’hypocrisie de ceux qui diabolisent le Vodun mais prompts à recourir à ses services nuitamment.

«Nous sommes réfractaires au Vodun mais nous pratiquons le Vodun tous les jours sans l’avouer», déclare-t-il lors de son intervention très ovationnée. «Ce que nous enseignons à l’Université doit porter les traces du Vodun. Nous ne pouvons pas enseigner autre chose que ce que nous sommes. Si nous ne parlons pas de nous-mêmes qui va le faire à notre place ?» interroge-t-il.

Les universitaires sont unanimes que le Vodun et les cultures africaines sont discriminés par exemple dans les manuels scolaires. «Lorsque vous demandez à un enfant quelles sont les grandes religions qui existent, il ne cite pas le Vodun alors que nous sommes dans l’espace du Vodun», déplore Kakpo.

Réécrire les manuels scolaires

Une injustice que le Comité des rites Vodun compte bien corriger. Il a en projet la «réécriture de nos manuels scolaires». L’historien des religions, le professeur Jérôme Alladayè est de cet avis. Il «adhère profondément à la proposition du postfacié qu’il nous faudrait une structure scientifique qui véritablement parle du Vodun en tant que ce qu’il est et non ce qu’on a voulu nous faire avaler dans le cadre de la mission civilisatrice. Nous avons besoin de déconstruire ce qui nous est dit de ce part essentiel de nous, le Vodun», insiste-t-il.

C’est d’ailleurs le constat qui fait dire au préfacier, le journaliste Sêmèvo Bonaventure Agbon, que le Bénin s’accommode «d’une laïcité de trompe-l’oeil. Du moins du point de vue des propos des uns sur les autres». Jérôme Alladayè fait le même constat.

«Chers collègues : Il y a une bataille que nous devons mener pour aboutir pour que la multitude de religions dans notre pays puissent continuer à coexister. Il faut que le dialogue interreligieux cesse d’être des mots. Il faut que toutes les religions soient sur les mêmes pieds d’égalité. Nous ne pouvons pas parler de dialogue sans que chacun ne soit indépendant, égal à l’autre. On ne peut parler de dialogue en continuant à hiérarchiser».

Dialogue interreligieux sincère. L’ancienne ministre de l’Enseignement supérieur et de la recherche scientifique, professeure Odile Attanasso y tient elle aussi. Elle révèle même que certaines paroisses organisaient « la messe du ”10 janvier” pour conjurer les mauvais sorts» car l’instauration de cette seule journée nationale fériée, et dédiée au Vodun «c’est contre les valeurs de l’Eglise catholique» lui avait dit une amie. L’ancienne ministre témoigne avoir refusé d’y participer à l’invitation de l’amie.

«Nous devons nous attacher à nos choses qui nous concernent avant de nous attacher aux choses des autres… Si nous renions tout ce que nous avons nous compromettons la voie du développement», jure-t-elle. Et d’avouer :

«Les questions que la fille lui a posées ce sont les mêmes questions que je vais lui poser (…) Il faut qu’au niveau du Bénin nous gardions la tolérance religieuse», conclut-elle. Dans le même ordre, le professeur François Abiola reconnaît que plusieurs voies mènent à Dieu : les intermédiaires, dit-il, ça peut-être le Christ, l’islam… «C’est ce que Dodji explique à sa fille. Pourquoi on va s’entretuer pour ça ?» interroge-t-il.

La caution du Mtca

À la cérémonie de lancement qui s’est déroulé dans l’amphi Etisalat, l’écrivain Florent Couao-Zotti a représenté le ministre du Tourisme, de la culture et des arts, Jean-Michel Abimbola dont il est un conseiller technique. «Je connaissais Dodji à travers les médias. Chaque fois que je l’écoutais j’étais très heureux par rapport à son phrasé (sa manière de parler le français). On a eu l’occasion de se rencontrer à plusieurs reprises. Il m’appelle “Nonvi”, frère en Fongbé, ce qui vous mets dans une espèce de confort. Une manière aussi de dire que vous appartenez au même univers de pensée.»

Le Vodun présenté à ma fille

Le travail de réhabilitation du Vodun qu’il fait, apprécie-t-il, est en harmonie avec l’esprit des Vodun days. «Ce qui fait la particularité du Zèbre c’est les zébrures. Et nous, le Vodun c’est nos zébrures.» L’auteur de «Les fantômes du Brésil», juge que «”Le Vodun présenté à ma fille” permet de voyager, de se promener dans un monde vaste que ce soit en tant que ce que nous connaissons comme Vodun originel et le Vodun qui a voyagé à travers l’esclavage et qui s’est enrichi de tous les apports. Je voudrais souhaiter à ce livre de voyager un peu partout dans le monde. Et qu’il apporte comme la bouteille à la mer les réponses à ces questions.»

Science de la religion

Le message du ministre de l’actuel ministre de l’Enseignement supérieur et de la recherche scientifique a été délivré par Sylvie de Chacus, sa représentante.

«A considérer le profil et les compétences de son auteur, je n’ai nulle doute que les idées développées viennent aussi bien du dehors que du dedans. J’espère aussi que les positions suscitent le débat en vue d’une meilleure compréhension du Vodun. (…) Au moment où le gouvernement dans sa vision stratégique a décidé de faire du tourisme religieux autour du Vodun, un levier de développement, toutes les initiatives qui visent à présenter le Vodun tel qu’il est et se pratique, sont les bienvenues», assure-t-elle.

Le Vodun présenté à ma fille est paru aux éditions du Larred -Laboratoire d’analyse et de recherche Religion, espaces et développement – dont l’auteur est le directeur scientifique. Au fil des 124 pages, Dodji Amouzouvi montre que bien qu’il soit un mystère, le Vodun vient de la soif de l’homme et apporte des réponses à ses préoccupations existentielles et eschatologiques.

Et c’est là toute la pertinence du plaidoyer du professeur Placide Clédjo. Le postfacié, directeur de l’École doctorale pluridisciplinaire, Espaces Culture et Développement milite en vue de l’avènement d’une science des religions à l’Université d’Abomey-Calavi. Ce qui contribuera au «renouvellement de la discussion non seulement sur la religion mais aussi et surtout sur le dialogue inter religieux», souligne Dr Soubérou Océni, sociologue présentateur de l’ouvrage. L’ouvrage est disponible au Larred -Uac.

L’intégralité de la présentation du livre ci-dessous :

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Père Hermann Juste Nadohou-Awanou : «L’initiative des Vodun days est une initiative heureuse à part entière»
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1 Commentaire

Kpetre Hamid mars 15, 2024 - 7:55 pm

Où se procurer le livre ?

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