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Dr. Aziz Mossi: « Sur le plan logistique des femmes collaborent avec les groupes extrémistes au Nord-Bénin »

Par Arnauld KASSOUIN
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Sous le prisme de l’insécurité au Nord-Bénin, des femmes sont contraintes à un difficile choix. Entre menace, vulnérabilité et patriotisme, l’ambiguïté s’installe. Dr Aziz Mossi, Enseignant-Chercheur, spécialiste des questions de Radicalisation, extrémisme violent et de terrorisme détaille et renseigne dans cet entretien, ce qui ressemblerait au quotidien des femmes au Nord du Bénin face à la montée des mouvements extrémistes violents.

Bénin Intelligent: Est ce que vous pourriez nous parler un peu des dynamiques actuelles du genre au nord du Bénin, comment les femmes s’y prennent en matière de contre terrorisme ?

Dr. Aziz Mossi: Il faut déjà dire que les femmes font partie des groupes les plus vulnérables et les plus exposés. Comme vous le savez, dans cette région (Nord-Bénin), les femmes sont très actives. En fait, ce sont elles qui vont dans les marchés, en brousse pour chercher les fagots de bois par exemple. Aussi pour faire les récoltes des feuilles de baobab et des produits tropicaux comme le Néré et le Karité. Voilà que toutes ces activités citées se développent naturellement en brousse. Parfois très loin des agglomérations et des habitations.

Partant de ces faits, oui, elles sont appelées à rencontrer des groupes extrémistes violents dans leurs activités quotidiennes.Il est vrai que jusque-là, on n’a pas encore enregistré des actions qui ciblent que les femmes. Mais elles sont victimes à plusieurs titres. Déjà, en tant que mères, elles ont des enfants qui sont peut être exposés. Ou même qui font partie de ces groupes extrémistes.

Ensuite, en tant qu’épouses, elles ont aussi leurs maris qui sont soit exposés ou qui font partie de ces groupes. Ainsi, à plusieurs égards, elles sont concernées.C’est vrai qu’il y a des ONG qui travaillent beaucoup sur la protection des femmes, mais je pense que cela reste encore insuffisant vu le niveau d’exposition des femmes face à la menace. Quand il y a des camps de déplacés, ce sont encore les femmes qu’on voit, parce qu’elles sont les plus fragiles.

Dans le cas du Bénin, est-ce que vous avez connaissance de faits où les femmes sont parfois recrutées par les groupes armés terroristes ?

Il y a diverses façons de recruter. Il y a des recrutements en tant que combattant. Pour le moment, au Bénin, on n’a pas encore d’indices palpables, vérifiables sur les femmes combattantes qui sont recrutées aux côtés des hommes. À l’heure actuelle, mon niveau de recherche ne me permet pas de confirmer cela. Par contre, recruter pour d’autres tâches, oui elles le sont. Notamment sur le plan logistique. Il y a beaucoup de femmes qui collaborent avec ces groupes.

D’ailleurs, nous sommes entrain de réaliser actuellement une étude. Elle porte sur le rôle des femmes dans les régions du Nord-Bénin, Nord-Côte d’Ivoire et Nord-Togo que je coordonne. L’étude est toujours en cours. Il est vrai que la partie du Bénin est finie. Cette étude montre à titre illustratif que vous avez beaucoup de femmes ( au Nord-Bénin ndlr) qui sont en complicité avec des groupes extrémistes violents. Et ce, pour diverses raisons. Parce que c’est leurs enfants, maris, parents, neveux, qui sont des combattants. Ou c’est parce qu’elles sont à la recherche aussi de gain facile.

Business

On a vu des femmes qui entreprennent des relations de business avec ces groupes violents. Tout en leur fournissant du carburant, de la nourriture, des médicaments, et d’autres biens matériels dont on a besoin de manière quotidienne. On observe par exemple des femmes qui les approvisionnent en crédits téléphoniques et qui les aident à recharger leur téléphone. Il y a aussi des femmes qui font la prostitution. Tout concourt à gagner de l’argent.

On a vu aussi des femmes qui se sont mariées avec des extrémistes violents dans ces localités précitées. Elles apportent naturellement leur soutien en termes d’information. Il y a eu même certaines femmes qui ont été arrêtées ( au Bénin ) par la police et qui sont à la Criet. Vous avez aussi beaucoup d’entre elles qui sont encore là et qui, d’une certaine façon, accompagnent ces groupes extrémistes de diverses manières. Ça va au-delà du Bénin. C’est dans toute la sous région. Elles utilisent plusieurs moyens détournés pour aboutir à leur fin. Il y a des choses inimaginables. On ne pouvait pas penser que les femmes pouvaient être impliquées à ce niveau dans l’animation de l’extrémisme violent.

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Vous avez évoqué le fait qu’aujourd’hui, il n’y ait pas trop d’institutions ou d’associations d’ONG qui travaillent véritablement sur le sujet et qui siègent dans le Nord-Bénin. À quoi cela rime t-il selon vous ?

Il y a beaucoup de réseaux qui travaillent sur ces questions. Ils mettent beaucoup plus l’accent sur les vulnérabilités économiques des femmes. Les femmes sont économiquement vulnérables. Mais les motivations, comme je viens de le dire, ne sont pas forcément liées aux questions économiques. Je pense que d’autres aspects peuvent être également pris en compte.

Pour le moment, il n’y a que les Organisations Non Gouvernementales que l’on sent dans ce secteur d’accompagnement des femmes. Le but étant de les empêcher, donc d’être enrôlées par les groupes extrémistes. Mais le besoin est supérieur par rapport à l’offre. C’est clair qu’il y aura beaucoup de femmes qui y échappent. Surtout qu’il y a celles qui sont concernées et celles qui sont plus exposées.

Or, ce ne sont pas elles qui bénéficient de ces appuis. Juste parce que ces appuis, quand ils viennent généralement, il y a des critères de sélection. Il faut détenir peut être une carte d’identité, le Cip par exemple et avoir un numéro de téléphone. Il y a beaucoup de femmes qui n’ont pas du tout ces éléments là. Pourtant, elles sont exposées et sont très vulnérables.

Quelles sont les localités où les femmes sont plus impactées ?

Je pense que la question de la vulnérabilité est générale. Il y a des couches vulnérables dans toutes les communes. Si on doit considérer le niveau même d’exposition à ces phénomènes, il y a quand même des communes qui sont très, très exposées. Et où les populations sont aussi très, très vulnérables. Je dirais même, c’est les plus vulnérables, des vulnérables.Il y a par exemple la commune de Karimama. Commune complètement enclavée, dont les 4/5 de sa superficie sont dans le Parc W où ils ( habitants ) ont des problèmes de terre pour cultiver. Ils sont entre le parc W et le fleuve. Aussi, ils n’ont pas de marché d’envergure. Ils n’ont pas des possibilités d’écoulement de leurs produits. Les terres sont insuffisantes. Le désert menace ses localités avec beaucoup d’effets négatifs du changement climatique.

Dans l’Alibori on peut aussi voir Banikoara. Les gens pensent que Banikoara, c’est une commune prospère. Toutefois, je pense que c’est l’une des communes les plus pauvres du Bénin. C’est vrai que vous avez des individus riches, des agriculteurs qui ont beaucoup d’argent, mais vous en avez aussi qui sont très pauvres dans cette localité. Il y en a qui n’ont même pas de terres pour cultiver. Tout ça juste à cause de la culture du coton qui a dévasté et rendu infertile beaucoup de terres.

Régions touchées

Vous avez aussi le Parc qui empêche de développer et d’exploiter d’autres superficies. Nous avons également Kérou qui fait partie des communes les plus vulnérables. De ce que je sais, c’est à cause des mêmes raisons évoquées précédemment.Les femmes dans ces localités précitées sont davantage vulnérables que dans d’autres communes.

Dans le département de l’Atacora, je vois Matéri, Cobly, Tanguiéta également qui sont couvertes par le Parc Pendjari avec 2/3 de leur superficie. Donc finalement, vous avez toutes ces communes qui sont à la frontière avec le Niger ou le Burkina Faso. Sans compter Ségbana dont beaucoup ne parlent pas mais qui est une commune très vulnérable et exposée à côté du Nigeria. Dans cette localité, il y a beaucoup d’enlèvements qui sont opérés. En septembre 2022, il y a eu l’enlèvement de la femme d’un bouvier dans le village de Guéné Laga. Dans la nuit du 30 avril au 1er mai 2023, un élu local du nom de Sabi ASSO, éleveur a aussi été enlevé.

Dans cette localité, les exemples sont légions. D’ailleurs, sur le sujet des enlèvements on a sorti une publication dernièrement. Je puis vous dire que Ségbana fait partie des communes les plus exposées à ces pratiques.

Selon vous, est ce qu’il y a une certaine interaction entre forces armées et les femmes dans ces zones citées un peu plus haut ?

J’avoue que les forces de défense et de sécurité ont du mal à communiquer avec les femmes, surtout dans certaines communautés. Je ne voudrais pas stigmatiser une communauté. Mais dans les communautés peules par exemple, la communication est très difficile avec les femmes. Parce que déjà ce sont des communautés très solidaires entre elles, où les individus sont très solidaires entre eux. Les femmes n’ont pas forcément droit à la parole dans la sphère publique.

Donc le contact avec les femmes, avec d’autres personnes non résidentes ou des personnes qui ne sont pas de la communauté est très difficile. La communication n’est pas facile. En termes de collaboration, les forces de défense et de sécurité ont beaucoup de mal à communiquer, à collaborer avec les femmes. Surtout avec les femmes de l’ethnie peul qui observe toujours un mutisme ou une certaine ignorance. Quand bien même elles sont complètement impliquées et parfaitement au courant de ce qui se passe. Elles font toujours semblant de ne rien savoir, de ne rien comprendre.

Quelle interaction peut-on observer avec les migrants burkinabés surtout avec les communautés peuls et ceux de la région ?

C’est vrai, vous avez beaucoup de migrants, des déplacés qui arrivent du Burkina, du Niger, même du Togo dans l’Atacora. Des populations togolaises y siègent même actuellement. Vous savez, dans nos communautés, nous avons des espaces où les frontières ne sont pas vu de manière culturelle, comme des obstacles juridiques. Vous avez des Béninois qui vivent de l’autre côté du Burkina.

De même que des Burkinabè qui vivent du côté du Bénin. Il y a même des familles qui sont divisées entre les deux territoires. C’est le même peuple. De manière sociale, culturelle et économique, les populations, elles-mêmes ne voient pas de frontière. La frontière intervient quand l’État intervient pour mettre des dispositifs de barrières. C’est à ce moment que les populations prennent conscience de ce que là bas, c’est le Bénin. Et ici c’est le Burkina. Il y a ce brassage qui existe déjà, de sorte que lorsqu’il y a des menaces du côté du Burkina, les gens viennent très facilement du côté du Bénin, chez leurs parents, etc.

Beaucoup vivent dans les communautés, que ce soit dans les communautés peules ou dans les communautés autres que peules. Il y en a aussi qui sont dans des camps. Je ne dirai pas des camps de réfugiés, mais dans des espaces réservés par les autorités communales pour accueillir ces populations déplacées. Même si la plupart d’entre elles sont en communauté et ont des hôtes qui les hébergent. Qui leurs fournissent quand même des appuis. Notamment en termes de terre et d’autres services sociaux dont ils ont besoin pour survivre dans leur déplacement.

En matière de résolution de conflits, que pensez-vous de ceux qui disent que les femmes doivent être impliquées à tous les niveaux ?

Ceux qui disent ça ont raison. Parce que, comme on l’a déjà vu, en termes de prévention, les femmes jouent un rôle important. Que cela soit dans la sensibilisation et l’éducation des enfants. Dans les localités confrontées au terrorisme, ce sont surtout les femmes qui éduquent les enfants. Les papas ne sont pas forcément présents pour éduquer.

Par contre, les femmes sont au centre de l’éducation des enfants, donc elles peuvent si elles ont connaissance des mécanismes de prévention. Elles peuvent développer des discours de persuasion de leurs enfants pour les empêcher de ce fait d’être recrutés par les groupes extrémistes. Elles peuvent de par ce fait, persuader leur mari si elles ont connaissance de leur projet. Si elles ont connaissance bien sûr des dynamiques développées autour de ces activités. Elles peuvent persuader les hommes de rejoindre ces mouvements.

Alerte précoce

Maintenant, pendant les conflits, oui elles sont là. C’est elles qui appuient les combattants ou les populations. Ce sont elles qui apportent le soutien moral et les vivres pour les gens. Comme ce sont des personnes qui se déplacent aussi beaucoup. Elles disposent d’une niche d’information importante. La femme, elle a naturellement le sens de l’observation, le sens du détail. Si une femme rencontre par exemple un djihadiste dans la brousse, et qu’elle disposait de connaissance sur les critères d’identification, tout de suite, elle peut savoir que telle personne fait partie de tel groupe.

Elles peuvent aussi donner des informations aux forces de défense et de sécurité pour leur permettre de jouer pleinement leur rôle. Après les conflits, elles sont aussi là. Pour apaiser les cœurs, puis sensibiliser toujours les victimes, etc. Leur apporter des soutiens moraux qui leurs permettront donc de revivre et d’accepter tout ce qui s’est passé. Faire table rase peut être de la situation et de continuer par se nourrir d’espoir pour vivre encore.

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Pensez vous qu’elles peuvent être utiles, par exemple dans la collecte de renseignements pour l’État ? Et est ce que cela n’aurait pas de répercussions sur leur famille ou bien leur entourage ?

Oui, bien sûr, si elles sont identifiées comme telles. De toutes les façons, avec les mouvements extrémistes ça ne sera pas que c’est parce qu’elles sont des femmes qu’elles ne sont pas visées. Déjà, oui, de par leurs activités, elles sont très informées. Elles sont capables de produire de l’information utile pour l’armée. Euh oui, en les utilisant comme des agents secrets, ça peut les exposer. Si les amis d’en face savent le rôle qu’ elles jouent, ça peut véritablement les exposer.

Toutefois, il faut reconnaître que ce sont des pratiques qui ont existé. Au Bénin aussi, ça peut être expérimenté. Le seul problème ici, c’est qu’on a beaucoup de femmes dans ces zones touchées qui ne sont pas instruites. Donc comme je le disais, n’ont pas forcément cet esprit de compte rendu. Avec tous les éléments qu’il faut. Même si elles ont l’information, la façon de rendre l’information peut ne pas être forcément la bonne. Elles peuvent aussi, peut-être en collaborant indirectement avec ces groupes ( extrémistes ) se laisser convaincre.

Tout peut basculer de l’autre côté. Puisqu’on a vu des femmes qui ont divorcé d’avec leur mari, qui ne sont pas affiliés à ces groupes armés et qui se sont mariées avec les gens de l’autre côté. Tout simplement parce que, quand elles ont eu des contacts d’affaires avec ces personnes, elles ont estimé que la vie est plus belle de l’autre côté.

Prendre les femmes pour en constituer des cellules d’alerte précoce ou bien tout individu, pas seulement les femmes, pensez vous que ça peut vraiment prospérer et aider dans la lutte contre le terrorisme ?

Si on avait su prendre les choses comme ça dès le départ, avant même l’installation effective du phénomène, je pense qu’on aurait pu gagner beaucoup d’avance sur eux. Parce que oui, les femmes, on les a pendant longtemps ignoré dans le dispositif. Comme d’habitude, parce que généralement, dans nos cultures, toutes les questions de sécurité se discutent entre hommes. Les femmes sont à la touche. Elles ne sont pas forcément impliquées et beaucoup de femmes aussi ont fini par incorporer ou intégrer cette réalité.

Par exemple, moi, dans le cadre de mes recherches, c’est souvent très difficile de discuter avec les femmes sur les questions de sécurité. Beaucoup disent qu’elles ne savent rien qu’il faut voir leur mari. Alors que ce sont des personnes qui ont beaucoup d’information. Elles savent que les jeunes du village ont rejoint ces groupes. Mais elles feignent de ne rien savoir. Elles ne disent absolument rien à ce propos pour ne pas exposer leurs enfants, surtout lorsqu’elles savent que l’armée est là.

Concernant la résolution 1325 de l’ONU, quelle analyse faites vous de son applicabilité dans dans le contexte béninois ?

Quand on prend souvent ces résolutions, elles sont de nature générale et globale. Au niveau local, il y a toujours des difficultés, des difficultés liées aux relations interpersonnelles. Nous avons une difficulté liée à notre culture elle-même qui n’est pas forcément favorable à l’application des dispositions. De l’autre côté aussi, vous avez ceux qui promeuvent ces lois.

De plus, vous avez des gens qui promeuvent ces politiques publiques globales dans leurs propres intérêts. La mise en œuvre n’est pas toujours facile ou n’est pas ce qu’ont aurait souhaité. Au-delà même de cette résolution, il y a beaucoup de textes et de lois qui ont du mal à être appliqués, même à l’interne. Déjà par exemple, au Bénin, heureusement qu’il y a eu la révision de la loi esur la lutte contre le terrorisme.

Sinon, il y a eu beaucoup d’amalgames, de confusions et de frustrations qui sont nées de certaines pratiques. Je vous donne l’exemple des couvre-feux qui sont instaurés dans certaines localités. Ces couvre-feux sont, disons, pertinents dans certaines localités qui sont vraiment exposées. Toutefois, la façon dont c’est appliqué pose toujours un problème. Parce qu’il y a la répression forte dans certaines localités. Alors que dans d’autres, on observe un certain laxisme.

Est-ce que pour vous, il y a d’informations concrètes pour vraiment juger de l’efficacité de ces lois, surtout concernant les femmes ?

Au delà des femmes, toutes ces lois ne sont pas forcément efficaces. Il y a parfois aussi du zèle dans l’application des textes. Aujourd’hui, tout ce qui est terrorisme, normalement est jugé par la Criet. Et vous avez des gens qui sont, à tort ou à raison, renvoyés à la Criet, alors qu’ils ne sont ni de près, ni de loin mêlés à la chose. Il n’y a pas d’enquête préalable.

Il suffit d’avoir, par exemple, des soupçons sur la personne. Je puis dire aussi que ces lois là sont instrumentalisées par les communautés. Quand il y a des griefs entre deux personnes, la personne qui est plus proche des autorités, peut signaler à la police ou à l’armée qu’il y a vu un djihadiste. Tout de suite on embarque la personne. Ça, c’est un problème. Surtout quand on approche un peu les pratiques de ceux qu’on considère comme agents de renseignement locaux.

Frustration

Ceux-ci ont le privilège d’être davantage plus proches des FDS. Ils utilisent ce privilège pour rançonner, pour régler des comptes avec des familles. Donc ça, c’est vraiment la difficulté qu’on a à respecter, à appliquer de manière objective certains textes de lois à des moments donnés. Quand vous avez des barbes, quand vous avez le front dégarni et que vous priez beaucoup, tout de suite, on peut vous confondre à un djihadiste.

Les exactions ne facilitent pas forcément la lutte et la collaboration entre FDS et les populations. La conséquence, c’est que jusqu’à l’année passée, vous avez plus d’une centaine de personnes qui ont été libérées, qui avaient été accusées d’être des terroristes. Mais après on s’est rendu compte que ce sont des innocents.

Or, certains ont déjà passé deux ans ou trois ans en prison. Ceux là vont retourner dans leur communauté sans autres formes d’accompagnement. Ils se retrouvent abandonnés à eux-mêmes et d’autres rejetés. Donc soit ils restent et subissent le rejet de leur communauté, soit les autres viennent leur proposer de les rejoindre. Très facilement, ces personnes peuvent partir parce que frustrées contre l’État, elles ne pourront plus être intégrées dans leur propre communauté.

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