Des résultats d’une étude publiée dans la revue Proteomics auraient confirmé l’érection de murs à base du sang humain dans le royaume du Danxomè. L’étude a été menée conjointement par six chercheurs dont un seul béninois, à savoir Didier N’Dah de l’Université d’Abomey-Calavi.
Il ressort de l’étude que, pour en arriver à la confirmation des légendes, les chercheurs disent avoir fait des analyses protéomiques sur des «échantillons prélevés sur la paroi intérieure d’une de ces huttes (jèxo)». Ce prélèvement issu d’une fouille archéologique des palais royaux d’Abomey menée entre 2018 et 2022. L’analyse montrerait que sur 68% de peptides, soit 215 types identifiés, 49 correspondent à des protéines humaines et 21 à des protéines spécifiques au coq domestique.
«Les protéines provenant d’Homo sapiens comprennent surtout des kératines, mais aussi de l’hémoglobine, de l’immunoglobuline, de l’albumine et de la myosine. Pour ce qui est du coq, il s’agit surtout d’hémoglobine et de kératines de plumes. Les auteurs en concluent que “du sang sacrificiel ou rituel était dilué avec de la terre et d’autres substances organiques” et que “la ‘Maison de l’Esprit’ consacrée par le roi Ghézo à ses ancêtres a très probablement bénéficié d’une cérémonie rituelle d’aspersion”»
Extrait d’un article de Science et Avenir
Par ailleurs, les résultats révèleraient aussi la présence du blé tendre (Triticum aestivum). Ce qui étonne les auteurs puisque cette « céréale n’était pas cultivée en Afrique à l’époque».
Légendes
Sur le Danxomè, plusieurs légendes font état de murs à base du sang humain. L’étude rappelle deux. Guezo aurait fait construire dans l’enceinte de son palais deux huttes sacrées (jexo) dont la terre des parois aurait été liée avec le sang de 41 victimes sacrifiées. En outre, « l’allée menant à sa hutte était pavée des crânes et des mâchoires des ennemis qu’il avait défaits et que l’un de ses trônes reposait sur les crânes de quatre chefs ennemis vaincus.»
Se basant sur ces résultats, les chercheurs déduisent alors que le sacrifice humain fait ”partie intégrante” des rituels Vodun. Une thèse discutable qui fera des mécontents. Récemment, dans un communiqué, le Comité des rites Vodun a martelé que le Vodun est fondé sur les valeurs éthiques et humanistes. Contre-attaquant ainsi les commentaires qui lient cette spiritualité, au Fa et à ses acteurs les crimes odieux qui sont plutôt d’ordre ésoterico-magique, selon le président du comité, professeur Mahougnon Kakpo.
Pendant la colonisation en effet, la question de la lutte contre les sacrifices humains était fondamentale dans la justification de la ”mission civilisatrice”. Dans son ouvrage “Le Catholicisme au pays du Vodun”, le spécialiste des religions, professeur Jérôme Alladayè s’en offusque et dénonce une une exagération et surtout une campagne de diabolisation gratuite contre le Danxomè et ses traditions.
Les auteurs
L’étude porte la signature de six chercheurs dont un seul béninois, à savoir Didier N’Dah. Il est enseignant au Département d’Histoire et d’Archéologie, Institut National des Métiers d’Art, d’Archéologie et de la Culture (Inmaac), de l’Université d’Abomey-Calavi.
Les français :
•Philippe Charlier et Virginie Bourdin, du Laboratoire d’Anthropologie, Archéologie, Biologie (LAAB), UFR des Sciences de la Santé (UVSQ/Université Paris-Saclay), Montigny-Le-Bretonneux, France.
•Mélodie Kielbasa, Olivier Pible et Jean Armengaud, tous les trois enseignants au Département Médicaments et Technologies pour la Santé (DMTS), CEA, INRAE, SPI, Université Paris-Saclay, Bagnols-sur-Cèze.