La majorité des citoyens béninois pensent que les médias ne sont pas très libres de commenter l’actualité sans censure gouvernementale. L’Ireg, le partenaire national d’Afrobarometer, a livré les chiffres mercredi 3 juillet, qui sont les derniers résultats de sa récente enquête menée au Bénin, auprès de 1200 personnes.
52% des Béninois estiment que les médias ne sont pas du tout ou pas très libres de diffuser et commenter l’actualité sans censure, ni ingérence du gouvernement. Selon les statistiques d’Afrobarometer, environ 7 personnes sur 10 soutiennent que les médias devraient être libres de publier n’importe quelles opinions ou idées sans le contrôle du gouvernement. En 2017, ils étaient moins de 5 personnes sur 10 à le revendiquer.
Un sondage qui conforte le rapport de Reporters sans frontières (RSf). L’Ong constatait que « la liberté de la presse a fortement reculé ces dernières années » au Bénin. Le pays est certes passé de la 112e place en 2023 à la 89e sur 180 pays en 2024 au classement de Rsf. Mais pas grand-chose n’a changé.
«Le pouvoir a une influence décisive sur la nomination des principaux responsables des médias d’État et de la Haute autorité de l’audiovisuel et de la communication (Haac) », constate Rsf. De plus, « l’Ortb, et particulièrement la télévision, est contrainte de relayer la communication du régime alors que les médias proches de l’opposition sont soumis à de fortes pressions ».
Sans compter que « de nombreux médias s’abstiennent de critiquer ouvertement le gouvernement afin d’éviter une fermeture par la Haac ». Reporters sans frontières soulève également un contrôle du gouvernement sur fond de contrat de partenariat avec les médias.
De son côté, Afrobarometer à travers l’Ireg note une diminution des souhaits d’enquêtes sur la corruption gouvernementale les dix dernières années. Bien qu’étant toujours élevées, les statistiques révèlent que désormais 68% contre 75% maintiennent ce souhait. Ils estiment que trop de publications sur la corruption et les erreurs du gouvernement pourraient nuire au pays. « Les répondants de sexe masculin affirment majoritairement que les médias doivent enquêter et publier sur la corruption du gouvernement », précise Dr Jean-Luc Houngbeme, directeur exécutif de l’Ireg.
«Une démocratie avec des problèmes mineurs»
Sur la question du fonctionnement de la démocratie au Bénin, la majorité des personnes sondées, soit 60% sont insatisfaites. Ce taux a connu une hausse de 12 points depuis 2017. Pour 6 Béninois sur 10, leur pays est une « démocratie avec des problèmes mineurs ». Et, plus le niveau d’instruction est élevé, plus ils sont insatisfaits de la manière dont la démocratie fonctionne dans le pays.
Aussi, la majorité des Béninois affirment être « assez » ou « entièrement » libres d’exprimer leurs opinions (58%), d’adhérer à une organisation politique de leur choix (77%), et de choisir sans pression la personne pour laquelle ils veulent voter (83%).
Toutefois, ces libertés ont reculé par rapport à il y a 10 ans. Et ici, plus le niveau d’instruction est élevé, moins ils s’estiment libres d’exprimer leurs opinions. Ceux qui ne se sentent pas libres d’exprimer leurs opinions ou d’adhérer à une organisation politique de leur choix sont plus enclins à être insatisfaits du fonctionnement de la démocratie. De même, la liberté de vote a chuté d’environ 10 points de pourcentage sur les dix dernières années.
Ces opinions rapportées des répondants âgés d’au moins 18 ans ne sont qu’une cartographie à une période donnée. S’il survenait des facteurs exogènes qui portent un coup aux comportements ou aux citoyens, lorsque cette collecte sera reprise, on aura une cartographie différente, a souligné le directeur exécutif de l’Innovante recherche en économie et gouvernance (Ireg).
Par Félicité DJIGLA
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