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Colloque international Mgr Isidore de Souza (II)/ de Souza : des leçons de démocratie

En revisitant aujourd’hui, vingt ans après son décès, la vie et l’œuvre de Monseigneur Isidore de Souza, on découvre plusieurs enseignements et appels qu’il a laissés pour la consolidation de la démocratie. A l’occasion du colloque (1er au 3 février) à lui consacré par l’Ecole d’initiation théologique et pastorale (Eitp) de l’Archidiocèse de Cotonou- qui fêtait ses un an de création- l’honneur a été fait à Célestine Zannou, femme politique d’extraire ces valeurs à partir des discours phares du prélat.

Par Sêmèvo Bonaventure AGBON

Sortis de la dictature avec son cortège d’arbitraire, d’injustices et de musellement, les Béninois ont intérêt non seulement à faire mémoire mais aussi à cultiver des valeurs pour ne pas retomber dans les mêmes vices du passé, auxquels ils ont renoncé en 1990. Dans sa communication, le 1er février à Bénin Marina Hôtel sur le thème : « Mgr Isidore de Souza : des discours fondateurs à la pensée politique », Célestine Zannou a rappelé ces valeurs à la lumière de quelques déclarations phares du prélat. Primo, le respect de la Constitution. Socle de notre démocratie, elle régule le fonctionnement des institutions, édicte les valeurs auxquelles le peuple est attaché, protège les libertés et la dignité humaine et organise l’Etat dans toutes ses dimensions. Une entorse à une disposition de cette Loi fondamentale vide donc la démocratie de son sens et nous expose aux crises. « Trêve donc à toute inconséquence qui nous conduirait à ignorer et même à contester la Constitution, fût-elle ‘’tordue’’, sur laquelle repose notre nation. Respectons-nous en respectant la Constitution, pour que notre pays soit respecté. ». Secundo, le refus du régionalisme. « Donnons-leur de bonnes habitudes. Apprenons-leur à ignorer d’où ils sont, mais qu’ils sont tous du Bénin. Apprenons-leur à ignorer qu’ils sont du Nord ou du Sud, mais qu’ils sont Béninois », recommandait le prélat au lendemain du second tour de l’élection présidentielle de 1991. Tertio, le devoir d’ingratitude. Monseigneur en a fait une obligation morale pour tous les citoyens promus à des postes de responsabilités. Nommés, oui mais pas pour s’ériger en défenseurs des intérêts de l’autorité qui vous a nommés. Une fois investis, vous devez seulement vous mettre au service de l’intérêt commun. « (…) je ne résiste pas à la tentation de vous faire part de ce que le professeur Badinter, président du Conseil constitutionnel français disait à ses confrères : « C’est maintenant qu’il faut marquer notre ingratitude à l’égard de ceux qui nous ont nommés ». Cela veut dire qu’une fois installés membres de la Cour constitutionnelle, vous devez oublier que votre nomination a été faite ou par le président de la république, ou par le Bureau de l’Assemblée nationale. Votre préoccupation première sera de constituer un corps, une institution qui assure son indépendance, son autonomie administrative voire financière vis-à-vis du Législatif et de l’Exécutif. » Quarto, dans un Bénin où plusieurs religions cohabitent, Monseigneur a insisté sur la tolérance. A l’occasion de l’installation du président Nicéphore Soglo le 4 avril 1991, il déclarait : « La tâche est immense, vous ne le savez que trop. Et c’est pourquoi en vous présentant les félicitations de toute la nation, je souhaite que le Seigneur vous redonne la pleine santé. Nous avons prié pour vous. Quelle que soit notre appartenance religieuse, musulmans, célestes, protestants, toutes sectes confondues, catholiques, vodounsi, nous avons prié pour vous ; le Seigneur a exaucé nos prières et vous êtes aujourd’hui parmi nous. Il couronnera son œuvre et vous rendra libre de toute maladie ». De cette déclaration, la communicatrice Célestine Zannou a déduit un appel au dialogue interreligieux, facteur de paix et de cohésion sociale. « La culture du dialogue, c’est ce qui caractérise Mgr de Souza », a-t-elle appuyé par ce témoignage du professeur Albert Tévoédjrè. Un cinquième et dernier appel : la culture de la non-violence. Elle réside dans sa célèbre phrase devenue proverbe : « Plaise au ciel, qu’aucun bain de sang ne nous éclabousse et ne nous emporte dans ses flots ». Il va poursuivre à la Conférence nationale de février 1990 : « Alors mes amis, merci pour votre détermination à évacuer toute violence, merci pour votre détermination à exclure de notre conduite tout esprit de vengeance, tout esprit de règlement de compte, nous devons la main dans la main bâtir ce pays ».

En résumé, tout ce qu’il faut pour qu’une démocratie marche, pour que l’Homme vive heureux se retrouve dans les discours du prophète Isidore de Souza qu’il importe donc d’incarner au quotidien. A juste titre, Célestine Zannou a comparé ce prélat à trois pierres : la pierre d’angle (qui tient tout ensemble, sans laquelle tout s’écroule donc), la pierre de touche (qui permet de mesurer, « Il nous a laissé une démocratie ») et la pierre philosophale qui a fait de la Conférence nationale de février 1990 une réussite inégalable en Afrique. Autant de valeurs qui donnent raison au Père Rodrigue Gbédjinou, directeur de l’Eitp qui a soutenu dans son mot de bienvenue au Colloque que « La vie et les œuvres de Mgr Isidore de Souza se profilent tel un testament à scruter, un héritage à fructifier, un programme flamboyant à décliner. »

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