Home Actualité Colloque scientifique ‘’10 janvier : et après ?’’ : La problématique des chefferies traditionnelles et de la gouvernance au Bénin

Colloque scientifique ‘’10 janvier : et après ?’’ : La problématique des chefferies traditionnelles et de la gouvernance au Bénin

Par Sêmèvo Bonaventure AGBON
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Le colloque scientifique international ‘’10 janvier : et après ?’’ sous le thème « Le Vodun dans un monde en mutation : De la prétention cartésienne à la rationalité mantique », a pris fin, vendredi 21 janvier par une cérémonie de clôture dans l’amphi Idriss Déby à l’Uac. Une table ronde modérée par le Dr Coovi Raymond Assogba, président du comité d’organisation s’est penchée sur la problématique des chefferies “traditionnelles” et de la gouvernance au Bénin.

Par Sêmèvo Bonaventure AGBON

Alors que les chefs traditionnels étaient jadis dépositaires du pouvoir politico-religieux, la colonisation a mis fin à leur autorité. Aux lendemains des indépendances, la question de leur place, de leur réhabilitation va se poser et se pose encore. Le Bénin, lors de la révision constitutionnelle du 1er novembre 2019, les a reconnus officiellement. Cette question a été décryptée par des personnalités averties. Il s’agit des professeurs Nassirou Arifari-Bako, Florentin Nangbè et A. Benon-Mora.

Dès la reddition de Dada Gbèhanzin, le gouvernement français a opéré l’ « auxiliarisation des autorités traditionnelles conquises », a résumé Nassirou Arifari-Bako. À leur égard, les attitudes des nouvelles autorités dans les désormais États républicains indépendants n’auront pas été identiques. Le député a établi en cinq typologies, les politiques gouvernementales postcoloniales vis-à-vis de la chefferie. Il s’agit, a-t-il énuméré, d’une « stratégie gouvernementale de l’exclusion » ; une « politique d’intégration systématique dans l’administration avec autorité » ; une « politique d’association » dans laquelle ils n’ont pas d’attribution claire mais qui leur confère une position de type consultatif notamment en matière foncière ; une « politique d’adaptation et de réinterprétation » qui fonctionne comme la continuation de l’auxiliarisation (les titres sont maintenu, mais un contenu nouveau) ; et enfin, l’ « existence comme un épiphénomène politique ».

Législation

La législation sur la chefferie traditionnelle ne manquera pas de susciter confusion et polémique. Selon un article du texte en préparation au Bénin, les rois ou chefs traditionnels appuient les autorités politico-administratives dans leur territoire respectif. L’article cité par le professeur Florentin Nangbè dispose même qu’ils peuvent être sanctionnés. Scandale ! « Assisterons-nous à des situations où un roi sera déchu ou emprisonné ? Est-ce béninois ? », s’est interrogé le professeur A. Benon-Mora. Le même texte, à en croire Dr Nangbè, a retenu quatre types de royauté, à savoir la royauté à caractère d’empire, la royauté simple, la royauté dépendante ou déléguée et les chefs de terre. Assis dans le public, l’historien des religions, Jérôme Alladayè qui a présenté la communication inaugurale du colloque, a fait observer que la législation sur la chefferie traditionnelle est un vieux débat. Les experts se sont entendus, dit-il, qu’il n’y a pas d’empire au Bénin. Il a alors vigoureusement souhaité que le gouvernement et les législateurs associent les experts, « les vrais », à cette réforme pour ne pas ajouter de la confusion à la confusion. À propos de la classification, le professeur A. Benon-Mora n’est pas satisfait. Dans l’Afrique précoloniale, a-t-il rappelé, « qui dit royaume fédère Vodunnon, Bokonon, guérisseurs, chefs de terre… », a-t-il rectifié ; puisque chefferie traditionnelle signifiait pouvoir, légitimité et sacralité.
Comment devient-on chef traditionnel hier et comment le devenir aujourd’hui ? De l’avis des communicateurs, c’est bien là aussi une épineuse question qu’une législation doit appréhender. Ce qui est sûr « la chefferie traditionnelle existera », croit Arifari-Bako. Toutefois, « elle restera toujours en position dépendante des autorités politico-administratives », a-t-il poursuivi. Et d’attirer l’attention sur le danger de « dédoublement fonctionnel (représenter à la fois la puissance publique et les populations) ».

Traditionnel ?

L’adjectif indispose plusieurs personnes. Il est « péjoratif et quelque peu folklorique », a reconnu Nassirou Arifari-Bako. Puisque, la « chefferie traditionnelle » sonne souvent comme une « antithèse de la modernité ». Il vaut mieux alors sortir des concepts français inappropriés comme « traditionnel », et retenir comme acquis épistémologique de désigner les réalités typiquement béninoises dans les langues des populations.

La résolution n°4 du colloque, lue à la clôture est entièrement consacrée à cette préoccupation. En la matière, la méthodologie du « Campus de Boologie » dirigé par le Dr Assogba, amène à ne plus voir le français comme « la langue obligée, mais plutôt, comme une structure adaptée pour exprimer les réalités et les faits de la pensée mantique ». La règle retenue consiste donc à « Constituer les mots en langues nationales, en concepts à conquérir, là où les mots en français sont impuissants à traduire les faits historiques béninois et africains ». Les participants au colloque scientifique international ‘’10 janvier : et après ?’’ ont alors décidé de penser la rationalité mantique en dehors de l’héritage de son exclusion voulue par l’action coloniale européo-chrétienne et d’utiliser le néologisme qui est une autre logique.

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