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Dr Coovi Raymond Assogba, sociologue « Le cercueil était une réalité factuelle, c’est quand il y a un décès qu’il est fabriqué »

Dr Raymond Assogba est contre l’exposition de cercueils. Le sociologue-anthropologue et boologue justifie sa position par le symbolisme du cercueil qui renvoie à la mort. Par conséquent, les préfabriquer en série sans qu’il y ait un décès et pire, les exposer publiquement aux abords des voies, « c’est une dénaturation de la philosophie du vivant dans le pays Vodun », le Bénin.

Propos recueillis par Sêmèvo Bonaventure AGBON

 

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Bénin Intelligent : Préfabriquer des cercueils et les exposer en publics, en quoi cela est-il indécent ?

 

Dr Raymond Assogba : À première vue, ce phénomène renvoie à la réalité du commerce. Lorsqu’il est exposé, le cercueil devient un bien économique. Le fabricant fait une publicité parce que pour acheter une marchandise il faut l’avoir vu ; il faut qu’on l’ait exposée. Donc c’est courant comme exposer le maïs braisé, ou bien la tomate. Mais cette pratique interpelle la conscience du symbolisme et aussi le principe de réalisme quand on connait le symbole du cercueil. Cela veut dire quoi ? Dans l’ancien temps on ne connaissait pas ce phénomène d’exposition des cercueils. Mieux, le cercueil était une réalité factuelle, c’est quand il y a un décès qu’il est fabriqué. On ne fabrique pas le cercueil avant le décès. Autrement, un cercueil fabriqué doit accueillir un mort. Fabriquer le cercueil avant qu’il y ait un décès veut dire que, métaphoriquement on souhaite qu’il y ait un mort. Or, dans le pays Vodun le seul souhait heureux qu’on formule à l’individu, c’est qu’il se marie pour procréer. La mort c’est un événement tragique qui enlève les bras valides, les agents de production, de développement. Donc aucune société ne peut souhaiter la mort d’un membre. Que, aujourd’hui les menuisiers fabriquent les cercueils en série et qu’ils les exposent, c’est une dénaturation de la philosophie du vivant dans le pays Vodun. Je pense qu’on devrait légiférer, l’Etat doit tenir compte des valeurs du pays Vodun pour rappeler les menuisiers à l’ordre, afin que les cercueils ne soient pas fabriqués avant les décès.

 

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Mais nous savons que nous sommes mortels. Voir des cercueils exposés ne devrait donc pas nous effrayer, non ?

L’être humain sait qu’il doit mourir. Mais ici nous sommes dans une situation de manipulation des vibrations selon le code qui permet à l’être de créer une matrice, de faire un moule. Quand tu fais un moule au plan mental l’esprit le remplit pour qu’il devienne réalité matérielle, physique. C’est différent de l’éducation sur la mort. Ici le cercueil n’est qu’un moule, un vœu concrétisé, matérialisé parce que physiquement il est fabriqué. En conséquence, c’est nocif pour la cité.
Je m’en vais vous raconter une expérience. Un jour nous étions partis à Savalou dans un cortège universitaire. Arrivés à un tournant quelque part, il nous a été dit qu’il y a un vendeur de cercueil qui a été frappé, chassé. En effet, les gens auraient constaté que depuis qu’il s’est mis à exposer des cercueils les cas d’accident sont devenus plus fréquents. Les gens ont investigué dans la paranormalité et ont pu déterminer que c’est le fabricant de cercueils qui produisaient les vibrations d’accident à ce tournant. Et donc il a été chassé. Les habitants nous ont témoigné que depuis son déguerpissement il y a eu baisse du taux d’accident. Donc il y a des choses comme l’exposition des cercueils qu’il faut pouvoir réglementer. Celui qui meurt, on ne l’enterre pas immédiatement. Donc la famille a le temps de commander un cercueil et les menuisiers ont le temps de le fabriquer.

La poussée démographique impacte forcément le taux des décès par jour, par semaine…Les choses ont donc changé, ne faut-il pas changé avec‚ Dr Raymond Assogba ?

Quand quelqu’un meurt, on attend toujours au moins deux ou trois jours avant de l’inhumer. Et puis il y a plusieurs menuisiers. Fabriquer et entreposer en cachette dans des magasins, c’est une possibilité. Mais ce qui est sûr le principe est le même.

 

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