Les actes de violences qui ont secoué l’élection présidentielle d’avril dernier ont laissé un goût amer dans la mémoire collective. À l’heure où le chef de l’État appelle à l’union sacrée autour des idéaux de développement du pays, l’opposition radicale exige des assises nationales, seule condition selon elle pour une décrispation. Quelle lecture fait la mouvance présidentielle de cette option ? Que propose-t-elle pour éviter à l’avenir de pareilles situations ? L’honorable Orden Alladatin a passé au peigne fin les contours du sujet.
Propos recueillis par Laurent KOKOU
BI: La dernière élection présidentielle dans notre pays a révélé les velléités d’une opposition radicale prête à en découdre avec le régime de la rupture. On a encore en mémoire les actes de violences sur fonds de déstabilisation qui ont émaillé le scrutin.
Vous nous direz assurément que ces actes incombent entièrement aux acteurs de cette opposition radicale. Mais le pouvoir n’a-t-il aucune part de responsabilité ?
He Orden Alladatin : Ni le gouvernement, ni la mouvance na aucune part de responsabilité dans les tristes événements qui ont émaillé la récente élection présidentielle au Bénin. La teneur de votre question illustre à merveille jusque où les auteurs et commanditaires de ces actes n’ont pas su ne pas aller trop loin.
Vous avez dit actes de violences et de déstabilisation de la part d’une opposition radicale prête à en découdre avec le pouvoir. Vous auriez dû dire pour faire court, une opposition va-t’en guerre. Non ! Rien n’autorise, en démocratie, à armer des chasseurs pour régler des problèmes politiques. Beaucoup de soutiens du gouvernement Talon ont par le passé été fâchés avec des régimes mais jamais, ils n’ont planifié et mis en exécution de tels actes. Disons simplement, plus jamais ça au Bénin !
Dans son discours d’investiture, le président Patrice Talon a appelé tous les filles et fils du Bénin à l’unité nationale autour du développement du pays. Peut-on espérer qu’il posera des actes décisifs à l’endroit de l’opposition pour un véritable dégel ?
Au cœur des difficultés depuis 2019, le président Patrice Talon a maintenu sa main tendue pour un dégel mais hélas ! Il nous a invité à un dialogue politique qui a permis de réelles avancées mais malheureusement, vous même vous avez reconnu qu’en face, il y avait une certaine opposition radicale qui voulait en découdre avec le pouvoir la suite, on la connait.
Néanmoins, j’ai la conviction que le président Patrice Talon en tant qu’élu de toute la nation continuera dans le sens de la recherche d’une sécurité collective, de la stabilité et de la paix dans notre beau pays le Bénin. Il est à espérer que celles et ceux qui ne sont pas d’accord avec le gouvernement s’opposent à son action dans la légalité républicaine.
Sans vouloir être dans le secret des dieux, pouvez-vous nous dévoiler quelques-uns des actes à attendre du président de la république ?
Le décret nommant le chef de file de l’opposition est signé et depuis, le président du plus grand parti de l’opposition est en action ; bientôt le décret nommant les membres du Conseil électoral où siègera désormais un membre de l’opposition es qualité sera pris. La démocratie est en marche et c »est tant mieux pour la République.
Aux lendemains de la présidentielle du 11 avril 2021, l’opposition a posé une condition pour le retour de la paix : les assises nationales. Comment appréciez-vous cette exigence ?
Vous savez bien que j’ai été pendant plus de trente ans, acteur majeur de la société civile au Bénin et jai surtout travaillé sur les questions de gouvernance et de dialogue politique. Il faut déconseiller à nos amis d’en face ce qui fait que vous-même les jugez de radicaux. On n’aborde pas un besoin de dialogue politique en termes d’exigence.
L’opposition exige des assises nationales, la mouvance parle d’ouverture au dialogue. Est-ce simplement un jeu de mots ou une véritable divergence de fond ?
C’est cela même la contradiction principale qui nous oppose. Une minorité ne peut s’imposer à la grande majorité de la classe politique voire du peuple qui vient d’accorder un nouveau mandat au président Patrice Talon. Celui qui définit le Cap à suivre c’est le président élu et sa majorité. Si ce minimum est compris de tous le dialogue devient fécond et bénéfique pour la cité.
Le concept de l’ouverture au dialogue” que la mouvance propose repose fondamentalement sur quoi ?
Le dialogue est inhérent à la vie en communauté. On y entre pour se parler et non pour en découdre. Je ne connais personne de la mouvance qui ne soit prête à des concessions qui nous avancent et qui profitent au plus grand nombre. Notre maître mot c’est une meilleure efficacité de notre démocratie ; c’est le développement.
Si les échanges directs du chef de l’État avec l’opposition à la veille des législatives de février, et le dialogue politique d’octobre 2019 au lendemain des consultations n’ont pas empêché que l’histoire se répète en pire, pensez-vous qu’une simple bonne foi d’ouverture au dialogue pourra ramener la paix tant souhaitée et nous éviter de pareilles tensions lors des prochaines élections ?
La condition sine qua non pour un lendemain meilleur pour tous, c’est que chacun d’entre nous reste dans la République. Cela suppose le respect de la légalité, la responsabilité, la bonne gouvernance et le dialogue continue.
Néanmoins, l’unanimité se fait de plus en plus sur la question des assises nationales aussi bien au sein de l’ensemble de l’opposition, des organisations de la société civile, que de la population. Cette option ne risque-t-elle pas de s’imposer ?
Je ne sais pas sur la base de quel indicateur vous affirmez cela. Le parti Union progressiste (Up) auquel j’appartiens ne l’a jamais demandé et je n’ai pas entendu les autres partis soutenant l’action du gouvernement manifesté cette préoccupation. A moins de demander au chef de l’Etat d’organiser une assise nationale pour l’opposition et la société civile. (Sourire).
He Alladatin, Si la situation politique demeure crisogène, délétère telle que nous la vivons, n’évolue-t-on pas encore vers des législatives sur fonds de tension ? Et à quel prix ?
Crisogène ! Délétère ! C’est un peu fort je crois. Entre 2019 et aujourd’hui, nous sommes passés par le dialogue politique avec des avancées significatives. Beaucoup de ceux qui ne voulaient pas se conformer au cadre légal des élections ont fini par le faire. Il reste que chaque parti travaille résolument sur le terrain pour valoir ce qu’il revendique. 2023 devrait être une occasion rêvée pour l’opposition de confirmer dans les urnes ce quelle a toujours clamé incarner.
Vous êtes le président de la commission des lois. Y-a-t-il des perspectives que les lois incriminées par l’opposition, notamment les articles concernant le parrainage et autres verrous soient sautés pour un processus électoral plus inclusif ?
Je croyais que ce débat était clos mais puisque vous en parlez, je vous dirai ce que j’ai déjà dit par ailleurs. Le président de la commission des lois ne décide seul de rien au parlement. Et puis les députés de la 8ème législature voteront des lois qui permettent au pays d’avancer et de rendre plus efficace notre démocratie. L’opposition qui revendique son ascendance populaire sur les partis de la mouvance devrait se réjouir de ce cadre légal électoral qui promeut les partis les plus représentatifs. Tout autre attitude serait suspecte.