
- Dr Zéphirin Cossi Daavo : « Les musées … ne sont pas des centres commerciaux ».
- Dr Blandine Agbaka : « Qu’est-ce qu’on fait pour que les Béninois fréquentent les musées » ?
À l’occasion de la Journée internationale des musées célébrée jeudi 18 mai, le Conseil international des musées (Icom) en partenariat avec l’espace culturel Le Centre a organisé une rencontre-discussion avec les acteurs sur la thématique de la durabilité des musées et du bien-être.
Par Raymond FALADE
« Musées, durabilité et bien-être », c’est autour de cette thématique que les professionnels du musée se sont entretenus au cours de cette rencontre-discussion initiée à la faveur de la Journée internationale des musées. Au nombre des panélistes, le président du Conseil international des musées (Icom) au Bénin Dr Zéphirin Cossi Daavo, la secrétaire générale Blandine Agbaka, le trésorier Imorou Abdoulaye et Jules Koukpode, le chargé des projets dans le rôle de modérateur. A la coordination, Marion Hamard, directrice de l’espace Le Centre.
Le débat sur la durabilité des musées nécessite un état des lieux au Bénin. C’est à cet exercice que le président de l’Icom Dr Zéphirin Cossi Daavo, s’est livré lors de la discussion. L’ancien conservateur du musée d’Abomey a fait l’état de lieux des musées au Bénin partant de sa définition, de sa mission et les catégories de musées qui existent. « Quand on parle de musée, c’est vrai que la mission même du musée n’est pas connue par la grande population mais il se fait que le Bénin occupe une place particulière en Afrique de l’ouest en matière de musée parce que les autres nous envient », introduit-il.
Au plan thématique, chaque musée traite d’un thème particulier. Le président de l’Icom les classe en deux catégories ; à savoir, les musées spécialisés et les musées éclectiques. « Ici le petit musée de la Récade [au sein de l’espace Le centre] a choisi de ne parler rien que de la récade. On peut dire que c’est un musée spécialisé. Il ne fait pas de mélange. Il y en a qui sont un peu éclectique où on peut trouver un peu de tout », explique Dr Daavo.
Il existe différents types de musés notamment, les musées d’histoire qui sont d’ailleurs les musées les plus connus, (le musée d’Abomey, le musée Honmey de Porto-Novo, le musée Danri de Nikki, le Fort portugais de Ouidah, etc.) ; les musées ethnographiques qui sont les musées les plus éclectiques où « il y a un peu de tout puisqu’il s’agit d’ethnographie » ; les éco musées : « qui contribuent à la protection du milieu où on trouve des espèces animales, des espèces végétales et tout ce qui est naturel (la forêt sacrée de Kpassè à Ouidah, le Jardin des plantes et de la nature de Porto-Novo (Jpn), etc. »
Certaines collectivités locales pensent que la création des musées est source de richesse. Ce qui n’est pas vrai, rectifie Zéphirin Cossi Daavo. « Les musées comme le dit même sa définition ne sont pas des centres commerciaux. Il ne faut pas ouvrir un musée pour se faire de l’argent », a-t-il indiqué. Selon le président de l’Icom, les musées c’est pour diffuser la culture. « Ce que le musée rapporte à une commune, c’est qu’il fait venir beaucoup de visiteurs et ces visiteurs dépensent sur place. Ils vont rester dans les hôtels, ils vont aller dans les restaurants, ils vont aller dans les centres artisanaux pour dépenser de l’argent. C’est l’avantage qu’on a dans les musées », a-t-il souligné. Et d’insister qu’il « ne faut pas croire que les 1000f, 2000f que les visiteurs donnent suffisent pour développer une commune ».
Durabilité et bien-être
« Qu’est-ce qu’on fait pour que les Béninois fréquentent les musées » ? C’est dans cette interrogation que se trouve la question de la durabilité des musées, a relevé Dr Blandine Agbaka, secrétaire générale de l’Icom. « La durabilité des musées en Afrique et au Bénin en particulier se situe là » a-t-elle indiqué. Pour cela, elle plaide pour « des musées bien vivants où les populations peuvent inter agir aisément, où elles peuvent se reconnaitre et ne pas juste penser que ça reste des institutions venues d’ailleurs qui ne les concerne pas ».
En effet, la question de la durabilité se pose parce que pour parler de développement durable, il faut la participation des communautés. Ainsi, cette thématique doit « nous interpeller à réinterroger aussi nos pratiques ». La durabilité des musées doit prendre en compte les différents acteurs, les communautés ainsi que l’environnement dans lequel ils sont implantés. Il n’y aura donc pas de différence entre « ceux qui sont instruits et ceux qui ne le sont pas parce que ceux qui ne sont pas instruits ne se sentent pas concernés par le musée. Ils se disent, c’est les choses des blancs, des intellectuels, des touristes », a illustré Blandine Agbaka.
La question du bien-être quant à elle, est liée à la durabilité. « Quand on aura réussi à faire du musée cet acteur totalement intégré dans son environnement, totalement intégré dans la communauté où les gens se sentent dépositaires de l’institution-là, » tout ira mieux, a rassuré la secrétaire générale de l’Icom.
Le Conseil international des musées (Icom) est une organisation non gouvernementale internationale qui travaille en étroite collaboration avec l’Unesco et d’autres organisations. Il a trois objectifs principaux : définir et défendre la mission muséale, la coopération entre les musées et mettre l’accent sur l’importance et le rôle des musées, a souligné Abdoulaye Imorou, trésorier de l’Icom.
LIRE AUSSI: Alexis Amègnonglo Fangninou, anthropologue culturel : « Le musée a un pouvoir d’éducation au patrimoine »
LIRE AUSSI: Exposition : Sika da Silveira ou l’art de l’équilibre cosmique