En fin de mission, l’Ambassadeur de France, Marc Vizy a réuni à Cotonou, samedi 13 juillet dans la Résidence de l’ambassadeur, des milliers de personnes devant qui il a prononcé un émouvant discours-bilan. Il y a retracé l’état de la coopération avec le Bénin. Il reste marqué par la qualité de l’accueil, la vitalité du partenariat multisectoriel entre les deux pays et souhaite le maintien de cette dynamique dans un monde en pleine crise géopolitique (Ukraine, Sahel).
Discours-bilan de l’ambassadeur Marc Vizy
Nous partirons de Cotonou fin août avec un vrai pincement au cœur, mais aussi avec le sentiment d’avoir donné pendant 4 ans le meilleur de nous-mêmes pour faire prospérer la relation entre nos deux pays. Le rôle du représentant de la France au Bénin est à la fois festivité par l’intérêt que suscite la France au Bénin et le Bénin en France et par l’amitié réelle qui existe entre nos deux peuples. Et parfois contrarié par le narratif volontairement entretenu par certains qui présentent tous les partenariats noués entre le Bénin et la France comme répondant à des agendas cachés, des intérêts masqués, voire des intentions malveillantes.
L’intérêt que la France attend de ces partenariats est très simple : entretenir une relation mutuellement fructueuse, avec un pays lié à elle par l’histoire, par les valeurs, par la langue et surtout par le brassage des populations. Vous le savez, une proportion très significative de la population française a des origines africaines, du Maghreb, d’Afrique subsaharienne, des Antilles. La France a donc, plus que tout autre pays européen, une forte part d’africanité dans ses gênes. Et donc rien de ce qui se passe en Afrique, en particulier en Afrique francophone ne peut la laisser complètement indifférente. C’est ce qui fait la richesse de notre relation, et parfois aussi, sa complexité.
Votre gouvernement a le projet d’accorder la nationalité béninoise aux afro-descendants. Nombreux français seront donc concernés, dont mon épouse et moi-même, je suppose. Car je pourrai aussi, par alliance, bénéficier du dispositif. Mais sachez que je n’attends pas l’octroi de la nationalité pour me sentir déjà béninois de cœur.
Jeux olympiques
Dans moins de 2 semaines s’ouvriront à Paris, les Jeux olympiques et paralympiques. Cet événement mondial sera l’occasion pour la France de réaffirmer l’importance du sport comme vecteur de solidarité et de développement entre les peuples.
Pour la première fois dans l’histoire des Jeux, la parité entre les athlètes hommes et les athlètes femmes sera complètement respectée. Une dizaine de sportifs béninois participera à ces jeux et la délégation béninoise se prépare actuellement au Montfort-le-Gesnois dans le nord-ouest de la France. 12 volontaires béninois sont aussi en France pour aider à l’organisation des jeux. Nous leur souhaitons à tous bon séjour en France et bonne chance.
Le sport reflète bien cette part d’africanité de la France que j’évoquais à l’instant. Mais aussi la part de francité de certains pays africains. Elle s’exprime par le mélange de population et le métissage qui est à l’œuvre dans notre pays, à l’image de notre équipe de France de football, mais aussi des équipes des pays d’Afrique francophone à la Can qui peuvent réunir pour certaines, près de 50% de joueurs binationaux français, nés en France et ayant des origines africaines.
«Et je crois avoir pu semer en toute loyauté, le doute dans l’esprit de ceux qui trouvaient une forme de confort dans le refus d’admettre que leur pays était un Etat pleinement souverain depuis 64 ans.»
Malgré les mauvais procès qu’on fait à la France, je veux vous dire qu’en 4 ans au Bénin, j’ai toujours et partout reçu, personnellement et en tant que représentant de la France, un excellent accueil amical et chaleureux. Même dans les réunions que j’ai régulièrement tenues dans des cénacles perméables à ces narratifs, ces échanges ont toujours été respectueux et courtois. Et je crois avoir pu semer en toute loyauté, le doute dans l’esprit de ceux qui trouvaient une forme de confort dans le refus d’admettre que leur pays était un Etat pleinement souverain depuis 64 ans.
Pendant 4 ans, j’ai aimé le Bénin et les béninois et en respectant pleinement leur souveraineté, j’ai œuvré à développer des partenariats entre nos deux pays. Parce que c’était le rôle qui m’était assigné par notre gouvernement et par notre président de la République qui a impulsé une vision renouvelée des relations avec les pays d’Afrique francophone, où la jeunesse se trouve désormais au centre des projets.
Parce que c’était aussi la volonté du Bénin et du président Talon qui souhaitait une densification de nos partenariats, dans une approche décomplexée des rapports entre nos deux pays. Une approche où se vivent clairement les choses entre nous, et où, parce que nous sommes amis et unis depuis longtemps, nous pouvons être mutuellement exigeants l’un envers l’autre sans risque de se brouiller. Mais aussi parce que je crois que nous pouvons faire de belles choses ensemble.
Restitution
En effet, le Bénin et la France peuvent donner l’exemple d’un monde meilleur. A l’heure où les dirigeants de certains États s’affranchissent du droit international pour mener des guerres impérialistes à l’image de l’agression russe en Ukraine, ou bien s’imposent au pouvoir par les armes.
Nos partenariats sont donc très nombreux. Je ne vais pas en égrener la liste car vous ne pourrez goutter à une spécialité ; celle que nous vous avons concocté ce soir… Sachez seulement que chaque année ce sont des centaines de projets et d’actions de coopération que nous menons ensemble dans les domaines de la formation professionnelle, de l’éducation, de la recherche, de la culture, de la santé, du sport, du développement urbain, de la protection de l’environnement, de l’énergie, de l’économie, de la sécurité intérieure ou de la défense.
Côté français, ces partenariats sont conduits par l’équipe France au Bénin que j’ai l’honneur de coordonner et qui est composée de l’ambassade proprement dite, avec sa chancellerie et son secrétariat général, son consulat qui a délivré en 2023, 14 mille visas, son service de coopération et d’actions culturelles, son service de sécurité intérieure qui travaille avec la Police républicaine et les sapeurs-pompiers béninois, sa mission de défense qui coopère avec les femmes dont une délégation – d’ailleurs je la salue- portera le drapeau et défilera demain [dimanche 14 juillet, ndlr] à Paris, mais encore avec l’Agence française de développement dont le portefeuille de projet au Bénin est de l’ordre de 470 millions de francs Cfa, l’Institut français du Bénin qui promeut la vitalité artistique béninoise et qui va bientôt se transformer en Institut franco-béninois installé dans le Quartier culturel et créatif; Campus France qui a préparé en 2023, 2500 jeunes béninois pour leurs études en France, l’école Montaigne qui a fait 1100 élèves et qui sera bientôt rejoint par 2 nouveaux établissements d’enseignement français : le lycée Pierre Manoël Talon à Fidjrossè et l’école Etoile des Nations à Akpakpa; France volontaire qui organise des échanges de volontaires entre les deux pays, l’Ird et … qui développent des programmes de recherche, associant chercheurs français et béninois.
Cette fondation si profonde est aussi portée par nos entreprises qui emploient près de 8 mille salariés et qui sont toutes devenues des entreprises franco-africaines (…) Elle est également portée par des Ong françaises et béninoises et est enfin portée par des volontaires.
Si je devais retenir un projet de mes 4 années au Bénin, c’est celui de la restitution des 26 œuvres royales d’Abomey en novembre 2021. Sa réussite est incontestablement un succès commun à nos deux pays qui ont ouvert une voie. Cette réussite n’a été possible que par le rétablissement d’une confiance qui s’était un peu émoussée après un premier refus.
«Je ne vous oublierai pas»
La volonté des présidents Talon et Macron a permis de rétablir cette confiance ce qui a donné aux deux pays, de décider de faire davantage ensemble (…)
Pour conclure, je voudrais sincèrement remercier tout le personnel de l’équipe France au Bénin pour leur travail durant ces 4 années. Je profite de l’occasion pour vous demander de réserver le meilleur accueil à l’ambassadrice Nadège Choaut qui me remplacera début septembre. Elle a beaucoup servi l’Afrique et elle a une forte expérience des dossiers culturels franco-africains.
Quant à moi, si vous me cherchez lors de vos passages en France, je serais probablement au cimetière des éléphants et retraités et comme tout homme-éléphant, j’aurais conservé une bonne mémoire et donc, je ne vous oublierai pas.