La capitale Porto-Novo a été du 2 au 4 août le théâtre d’une véritable parade de masques à travers toute la ville. Le Festival des masques a rassemblé un grand monde, aussi bien de nationaux que d’étrangers sur les différents sites aménagés pour accueillir les manifestations de cette première édition.
Pendant les 3 jours du festival des masques, chaque coin de rue a été pris d’assaut. On pouvait tomber à tout bout de champ sur un masque, qu’il soit sacré ou profane. Des Egungun par-ci, du Zangbéto par-là. Ce n’est pas le Gununko qui aura manqué à l’appel. Encore moins le Vodun Hunvè.
Sur les places se déroulent des animations artistiques et culturelles. Des masques venus aussi bien de l’intérieur que de l’extérieur du pays offrent aux spectateurs leurs savoir-faire. Chants, danses, exhibitions, panégyriques, prières et démonstrations acrobatiques, tout y est passé. La population massivement rassemblée sur la place Lokossa danse au rythme du ”Kpodji gègè” et d’autres groupes d’animations. Pendant ce temps, la place Migan accueille des démonstrations de Egungun et de Zangbéto. La place Iya Abessan n’a pas été du reste. A chaque emplacement, l’atmosphère est très euphorique.
Sur le village du festival installé sur l’esplanade de l’Assemblée nationale, la ferveur est la même. Avec les différents stands de la foire qui proposent tout type de produits artisanaux, culinaires, vestimentaires et bien d’autres. L’affluence ici est plus grande les soirs lors des différents concerts. Porto-Novo a vu défiler sur le podium du village du festival, des grands noms de la musique béninoise. Mais aussi des étoiles montantes. En tête d’affiche, il y a eu Zeynab, Bobo wê et l’infatigable Hagbè national, Sagbohan Danialou.
Le clou des manifestations a été la grande parade des masques sur la berge lagunaire de Porto-Novo. La population a été témoin des prestations de plusieurs masques. Venus aussi bien du Bénin que du Burkina, du Togo, ou encore de la Côte d’Ivoire. L’événement a connu la participation des autorités politiques et administratives dont le président de l’Assemblée nationale, Louis Gbèhounou Vlavonou.
Sur les traces du Vodun
Le Festival des masques à Porto-Novo, c’est aussi un colloque scientifique pluridisciplinaire. Il a réuni des enseignants-chercheurs, des scientifiques, des connaisseurs de la chose culturelle traditionnelle et des curieux à l’École du patrimoine africain (Epa). Ils ont réfléchi sur « les traces du Vodun dans les arts et cultures des sociétés post-esclavage ». Le choix de ce thème vient rectifier le tir sur « le discours péjoratif », « dévalorisant et dégradant » tenu jusque-là sur le Vodun, a précisé Prof Mahougnon Kakpo.
« Ce colloque vient à point nommé » pense le conseiller technique à la culture du Ministre du tourisme, de la culture et des arts (Mtca), Florent Couao-Zotti. Car il offre de comprendre « quelles ont été les influences du Vodun dans les sociétés où les noirs africains avaient été déportés ». Florent Couao-Zotti pense « qu’il y a eu une forte influence du Vodun qui a permis à ces différentes communautés [de déportés] de se retrouver et de continuer à vivre ». Cette influence s’est notamment manifestée à travers « l’art qui est un élément d’identification du patrimoine », voire « un élément de rassemblement des peuples ».
Les communicants ont même su montrer à merveille cette influence du Vodun, non seulement sur les expression artistiques et culturelles, mais plus encore sur la promotion de la cohésion sociale, confesse Florent Couao-Zotti. Pour le professeur Mahougnon Kakpo, président du Comité des rites Vodun, l’enthousiasme autour du colloque et la richesse des débats montrent que « nos vénérés aînés avaient déjà tracé le chemin de la connaissance, le chemin de la science véritable que nous ignorions ». Avec à la clé « de belles promesses » et « un satisfecit total » décerné même à l’international. L’engouement qu’a suscité la thématique démontre à suffisance la portée scientifique de ce festival. Il va donc au-delà de simples réjouissances populaires.
Succès et couacs !
L’appel a communication lancé dans le cadre de ce colloque a pris une dimension internationale. Il a obtenu en réponse plus de 70 propositions de communications venues de plusieurs pays. Les uns aussi bien que les autres ont évoqué les bienfaits et la grande contribution du Vodun dans la gestion des sociétés pré et post-esclavages.
Par ailleurs, le Festival des masques à Porto-Novo est loin d’être un bis repetita des Vodun days. Il a permis de révéler des « Vodun d’une autre catégorie avec aussi des masques profanes ». L’objectif principal du Festival est de « révéler nos traditions par l’intermédiaire des masques ». Prof. Mahougnon Kakpo souligne l’absence dans le vocabulaire français, de termes appropriés pour désigner les réalités révélées par ce festival. Ce qui justifie le choix du terme « masques sacrés ». « Sinon les vodun ne sont pas des masques. Le vodun, c’est le vodun, c’est un esprit », a-t-il recadré.
Cette première édition du Festival des masques à Porto-Novo vient remplacer le Festival international des arts et cultures Vodun du Bénin à Porto-Novo (Fip). Il s’agit d’une « édition test », souligne le professeur Mahougnon Kakpo. Elle permet, explique-t-il, de « voir ce qu’on pourrait encore faire pour que la manifestation soit davantage mieux vécue, mieux reçue et mieux réussie ».
Et il le faut puisqu’au 3e jour du festival, des frustrations ont été notées. Une bonne partie de la population n’a pu avoir accès au site prévu pour la parade des masques. Les courses et détours n’ont eu pour effet que de fatiguer des désireux. Et pour beaucoup se sont retournés tout dépités. Le reporter de Bénin Intelligent a même surpris des étonnés. « C’est quand je suis revenu de Cotonou que j’ai vu qu’il y a quelque chose de prévue », a déploré l’un d’eux. Pour d’autres le problème se situe au niveau « des canaux de diffusion ».
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