Dans le cadre de la célébration du 5e anniversaire de l’Ong Endoespoir, un film documentaire bouleversant a été projeté, jeudi 27 mars, à Canal Olympia de Cotonou. Intitulé handicap invisible, ce documentaire, réalisé par Innocentia Alladagbé, présidente de l’Ong et elle-même atteinte d’endométriose, plonge dans le quotidien éprouvant des femmes touchées par cette maladie encore méconnue.
Pendant 52 minutes, Handicap invisible a tenu en haleine l’assistance. L’histoire racontée à l’écran a figé la salle dans un silence de cimetière, seulement troublé par des cris étouffés et des soupirs d’émotion des actrices de circonstance. À travers le parcours de trois femmes atteintes d’endométriose, dont la réalisatrice elle-même, le documentaire met en lumière la souffrance silencieuse, le combat quotidien et les sacrifices imposés par cette pathologie.
L’histoire d’Innocentia Alladagbé commence en 2016. Confrontée à des douleurs persistantes, des crises répétitives et des diagnostics tardifs, elle a dû affronter des défis médicaux, personnels et professionnels. Les témoignages de son frère, de son médecin, de ses collègues et amis dressent le portrait d’une femme résiliente qui, malgré la souffrance, refuse de se laisser définir par la maladie.
Un combat quotidien éprouvant
«L’endométriose touche une femme sur 10», rappelle Lionel Yetongnon, médecin traitant d’Innocentia Alladagbé. Pour beaucoup de patientes, les traitements sont lourds et coûteux. Innocentia Alladagbé débourse jusqu’à 300 000 Fcfa par semaine pour ses soins, une réalité partagée par les autres victimes.
Chaque quatre heures, elle doit prendre des médicaments pour soulager la douleur. Conséquence, elle ne se déplace jamais sans «sa mallette de soins.» Pire encore, elle doit subir régulièrement des injections pour placer le cathéter. Une épreuve qui s’apparente à un véritable parcours du combattant, car la maladie a fragilisé ses nerfs. À cause de cela, le placement du cathéter peut prendre des heures, obligeant les médecins à piquer plusieurs parties de son corps avant de trouver un nerf adéquat.
L’endométriose ne se limite pas aux douleurs physiques. Elle entraîne aussi des conséquences sociales et émotionnelles lourdes. Innocentia Alladagbé confie que la maladie lui a fait perdre de nombreux amis. «Les vrais sont restés, mais beaucoup sont partis», témoigne-t-elle.
Cette pathologie est également marquée par le rejet, l’abandon et les moqueries. Sur le plan familial, les conséquences sont parfois dévastatrices. Certaines patientes font face à l’incompréhension de leurs proches, notamment de leurs conjoints. Un des témoins dans le documentaire a révélé que son époux a dû demander le divorce à cause de la maladie. Les démarches sont d’ailleurs en cours.
Un traitement limité et des choix déchirants
À ce jour, il n’existe pas de traitement curatif pour l’endométriose. La seule option qui peut soulager les patientes dans les cas les plus sévères est l’ablation des ovaires, une décision difficile pour les jeunes femmes ayant encore des projets de maternité.
Le documentaire ne fait pas l’économie des réalités brutales de la maladie. Les images sont parfois dures, mais elles traduisent l’urgence d’une meilleure prise en charge de l’endométriose. À la fin de la projection, l’émotion est palpable. Submergée par ses propres souvenirs et la charge émotionnelle du film, Innocentia Alladagbé peine à trouver ses mots.
La présence du président de l’Assemblée nationale Louis Gbèhounou Vlavonou à cette projection témoigne de l’intérêt grandissant pour cette cause, longtemps reléguée au second plan. À travers Handicap invisible, l’Ong Endoespoir espère briser le silence, sensibiliser l’opinion publique et encourager une meilleure prise en charge de l’endométriose au Bénin.
