La salle des fêtes et la salle du Peuple au palais de la Marina ont accueilli‚ ce samedi 19 février‚ un vernissage en prélude à l’exposition « Art du Bénin d’hier et d’aujourd’hui, de la Restitution à la Révélation » qui se tiendra du 20 février au 22 mai 2022. Un moment de retrouvaille et de convivialité entre plusieurs personnalités autour d’œuvres révélatrices du génie des artistes béninois.
Par Sêmèvo Bonaventure AGBON
C’est un véritable musée improvisé à la présidence de la république. Au centre des attractions, des œuvres magnifiques, extraordinaires soigneusement exposées dans un cadre tout aussi épatant. Ce sont les statues ou portes sculptées, les trônes ouvragés, ces autels portatifs ou récades magnifiées, revenues de 129 ans d’exil en France. Sur le prolongement‚ les fruits du talent des figures de l’art contemporain béninois‚ notamment Yves Apollinaire Pèdé, Romuald Hazoumé, Moufouli Bello, Cyprien Tokoudagba‚ Nathanaël Vodouhè, Ponce Zannou et Dominique Zinkpè‚ dignes successeurs des pionners comme Sossa Dede.
Dans la salle l’admiration est forte. Les guides vêtus de t-shirts noirs débordés, Patrice Talon s’improvise lui-même médiateur culturel face à des expatriés curieux. « J’ai la chair de poule face à certaines œuvres », avoue-t-il plus tard, promettant de revenir seul profiter des moments de contemplation plus calmes qu’offre la nuit. Les œuvres exposées constituent « notre âme », martèle-t-il encore comme lors de leur réception le 10 novembre 2021. À ses côtés, un prédécesseur visiblement plus en vue : Nicéphore Dieudonné Soglo parmi un groupe constitué de têtes couronnées. L’homme bravant son âge avancé est heureux de rencontrer sur les lieux Lionel Zinsou accompagné de sa fille Marie Cécile, directrice de la Fondation portant leur patronyme. « J’ai essayé de vous joindre plusieurs fois. Je n’arrive pas à vous avoir », dit-il à l’ex premier ministre sous Boni Yayi. Appuyé sur sa canne et majestueux dans son ‘’agbada’’ blanc, le fils d’Abomey déborde d’émotions. « C’est super ! C’est merveilleux ! C’est incroyable, ce qui peut sortir de la tête d’un artiste », s’exclame-t-il maints fois. Grand homme de culture très fan d’Aimé Césaire, l’ancien président de la république n’hésite pas à renchérir les explications du guide. «Si tu ne connais pas ton histoire‚ tu ne connais rien»‚ assène-t-il. Une œuvre les a particulièrement retenus‚ à savoir l’ “assen” du roi Gbêhanzin. Elle est mystique en ce sens que cet objet représentant l’esprit d’un défunt se fabrique post-mortem selon la tradition dans l’ancien Danxomè. La personne concernée ne devrait pas, en effet, le voir de son vivant. Comment se fait-il alors que celui du dernier roi du Danxomè ait été déjà conçu puis emporté par le Général Dodds qui a obtenu la reddition du Requin ? A-t-il été apprêté parce que Fâ, par l’entremise du légendaire Bokonon Guèdègbé prédisait l’échec inévitable de Gbêhanzin face aux troupes coloniales françaises à l’époque ? Un mystère que les universitaires continuent de creuser, sert le médiateur. D’autres personnalités ne se sont pas fait compter l’événement. «Une fierté de voir tous ces talents exposés»‚ confie‚ souriant le chanteur Nel Oliver.
Peu vus ces derniers jours, Adrien Houngbédji et Mathurin Koffi Nago, les anciens présidents de l’Assemblée nationale sont eux aussi de la partie. Outre la Première dame Claudine Talon, les membres du gouvernement sont fortement présents. Entre autres‚ Abdoulaye Bio Tchané, ministre d’État chargé du Plan‚ et Modeste Kérékou en charge des Petites et moyennes entreprises. Sans oublier le nonce apostolique près le Bénin et le Togo, Mgr Mark Gerard Miles; le Premier vice-président de l’Assemblée nationale Robert Gbian et les rois Zéhè d’Agonlin et Kpodégbé Lanmafan Toyin Djigla d’Allada.
34 artistes, trois mois d’exposition
Ce vernissage en présence du président Talon annonce l’exposition qui se veut diptyque et publique. Elle est conçue pour mettre de façon simultanée un coup de projecteur sur l’art classique du Bénin à travers les 26 trésors royaux rapatriés du musée du quai Branly, et sur la scène artistique contemporaine du Bénin et de sa diaspora. Sont à découvrir des artistes majeurs comme émergents sur un parcours muséal de plus de 2000m2. Dans une approche diachronique, allant du XIXe au XXIe siècle, entre chef-d’œuvres du passé et du présent, l’exposition « Art du Bénin d’hier et d’aujourd’hui : de la Restitution à la Révélation » rend accessible, de façon inédite, la création patrimoniale et contemporaine béninoise à un public large, national et international, au Bénin ; centre névralgique de création et de diffusion artistique du continent africain.
Les portes des lieux s’ouvrent au public dès demain dimanche 20 février. L’exposition comporte deux volets. Le premier intitulé « Art contemporain du Bénin », réunit 34 artistes contemporains et plus d’une centaine d’œuvres, déployant toute la vitalité artistique de la scène béninoise à travers une diversité de médiums, d’esthétiques et de techniques : peinture, sculpture, installation, art vidéo, dessin, art numérique, performance. Le volet « Trésors royaux du Bénin » présente en majesté les œuvres restituées par la France et qui sont revenues au bercail après 129 années d’exil.
La ministre française de la Culture Roselyne Bachelot est spécialement au Bénin dans le cadre de cette exposition d’art.