Le président de la Padem-Bénin juge « La sanction… un peu dure » parlant de la suspension, par la Haac, du groupe de presse La Gazette du Golfe pour apologie de coups d’État.
Bénin Intelligent : La Haac a suspendu mardi, le groupe de presse La Gazette du Golfe pour apologie des coups d’Etat. Quelle est votre réaction par rapport à cette décision ?
Basile Tchibozo: Je crois que la Haac est dans son droit. Vous avez, la Haac n’a pas agi ex nihilo. La Haac a sorti d’abord un communiqué demandant à tous les acteurs des médias de faire attention en ce qui concerne le traitement d’information relativement aux coups d’Etat. Le Bénin étant aussi engagé dans le processus de la Cedeao, il va de soi que la Haac puisse prendre une décision comme cela.
Mais il nous appartient nous acteurs des médias aussi de faire attention à ce métier. J’ai lu un peu la décision, j’ai lu les motifs, les éléments qui ont amené à la suspension. Je crois que quelque part nos confrères de Golfe TV ont manqué un peu de délicatesse dans le traitement de l’information parce que j’ai cru comprendre que l’émission qui a été visée, c’est une émission de débat interne mais qui a été d’une certaine violence.
Et en la matière, ce qu’on peut observer en période de délicatesse n’a pas totalement été observé. Ça il faut le connaitre. La déontologie, l’éthique du métier et ce que requiert le traitement de l’information en période de guerre, en période de tension, n’a pas été respecté. Nous devons nous dire la vérité. C’est pour dire qu’on doit faire attention par rapport au traitement des informations en période de tension, en période de délicatesse. Je crois que la Haac a réagi par rapport à l’inobservance de cette disposition-là.
En grosso modo, les confrères n’ont pas observé un certain nombre de délicatesse dans le traitement de l’information.
Pour ce qui est de la Haac, toute suspension, toute suppression d’un organe de presse est une réduction de l’espace de liberté. Et en matière de presse, la liberté est la donne. L’action liberté est l’exception. L’exception ne doit plus gouverner aujourd’hui nos Etats particulièrement en ce qui concerne les décisions que la Haac doit prendre. La Haac peut faire la mise en demeure. La Haac peut faire des avertissements. La Haac est partie trop vite en frappant ici et maintenant. C’est cela qu’on peut regretter un peu.
C’est parti très vite et cela touche encore l’ensemble du groupe : la radio, la télé, les canaux digitaux et puis La gazette du Golfe c’est-à-dire le journal qui ne paraît même plus. La sanction a été un peu dure à mon avis.
La suspension des médias pour ces genres de motif est-elle la solution aux coups d’Etat ?
Ca ne peut pas être la solution. Mais comme je l’ai dit, je crois qu’on doit faire aussi attention à ne pas enflammer les situations. Dans le même temps, je crois que les agents de régulation de la sous-région ou bien de l’Afrique doivent faire attention aux décisions aussi dures ; parce que en la matière, c’est une liberté qui a été restreinte. C’est un organe qui est éteint et ce n’est pas bon.
Comme je l’ai dit, le principe aurait été les avertissements, les mises en demeure avant de frapper c’est comme ça.
Quel est votre souhait ?
Notre combat, c’est la défense de la liberté de la presse et la défense de l’intérêt des professionnels des médias en passant déjà par les membres de la Padem et bien sûr l’ensemble des professionnels des médias ; parce que après tout, ce sont des femmes et des hommes qui sont mis en chômage technique. Cela implique que les salaires ne seront pas payés… Encore qu’en termes de salaires, on sait ce que ça veut dire en République du Bénin aujourd’hui. C’est une sorte d’accélération de la précarité qui frappe déjà les journalistes de Golfe Fm qui sont obligés de rester à la maison pour chômage technique.
Deuxième chose. Je salue la démarche de la Haac ; parce que j’ai vu Charbel Ahihou qui a lu complètement la décision et qui a dit que le groupe prend acte. C’est un acte de décence et d’élégance que moi j’ai approuvé. Donc, ils n’ont pas fait de la résistance, ils n’ont pas fait de la protestation. C’est une bonne chose.
Au nom de ces démarches-là, je vais demander à la Haac, de bien vouloir observer une sorte de douceur de la décision, de bien vouloir mettre un peu la balle à terre, de ne pas trop pousser le délai conservatoire, de voir un peu la possibilité de lever la sanction afin que Golf vive encore.
Je demande à la Haac de bien vouloir mettre de l’eau de son vain et d’aller très vite à la grâce pour ne pas faire trop durer cette période de mise en demeure ; parce qu’on dit que c’est jusqu’à nouvel ordre. Si c’est jusqu’à nouvel ordre, le temps peut aller très loin. Donc, le temps peut durer en longueur. C’est ce que moi je vais souhaiter à la Haac ; demander la clémence de la Haac et de tout le conseil par rapport au dossier de La Gazette du Golfe.
Propos recueillis par Raymond FALADE
