Le Révérend docteur Gaspard Moyede est enseignant de l’histoire du christianisme à l’Université protestante d’Afrique de l’ouest (Upao). Vendredi 14 novembre dernier, il a participé à l’Université d’Abomey-Calavi au symposium sur le sujet « À la croisée des théologies : une mise en perspective croisée des théologies du Vodun, du Christianisme et de l’Islam ».
Dans cet entretien à l’issue des échanges, il prône une rupture avec les débats dogmatiques cluvants et un retour à la valeur fondamentale de l’amour. Pour lui, la clé du vivre-ensemble dans un pays multiconfessionnel comme le Bénin réside dans la capacité des religions – Vodun, Christianisme et Islam – à se respecter et à œuvrer ensemble pour la construction nationale, au-delà des différences.
Bénin Intelligent : Pourquoi est-ce utile aujourd’hui de croiser ces différentes théologies ?
Rév. Dr Moyede : Le contexte, l’environnement dans lequel nous vivons aujourd’hui au Bénin, le demande. Il faut que les trois théologies se croisent pour que nous puissions voir dans quelle mesure nous pouvons essayer de rester ensemble pour construire, pour bâtir un Bénin juste. Un Bénin qui travaille pour l’humanisme. Afin que, dans notre diversité, nous puissions consolider notre unité.
Le Bénin a connu plusieurs efforts en faveur du dialogue interreligieux. Qu’est-ce qui bloque un dialogue vraiment profond et sincère entre les différentes obédiences ?
En vérité, pour ce qui me concerne, je pense que tant que chacun dans son coin va continuer à tenir ce langage-là, le langage qui tente de défendre sa position, nous n’y arriverons jamais. Pour le dialogue religieux, le vivre-ensemble, je pense qu’il ne faut pas aller sur certains terrains dogmatiques qui tendent à frustrer les uns les autres.
Les débats relatifs à certains dogmes ne pourront pas favoriser un terrain fertile pour le dialogue interreligieux. Pour un bon vivre-ensemble, je pense aussi qu’il faut enterrer notre orgueil religieux et le moi égoïste, en dehors de nos différences, et accepter l’autre, avoir le courage d’accepter l’autre, l’autre vis-à-vis, et reconnaître qu’en lui, c’est déjà un terrain où Dieu travaille déjà, et l’accepter.
Vous avez témoigné de la symbiose qui règne dans votre famille malgré la diversité des orientations religieuses. Quel est votre secret ?
En réalité, je n’ai pas un secret. J’ai simplement refusé de me faire formater par certains dogmes chrétiens. Et j’ai mis ensemble l’histoire du christianisme et le langage biblique : c’est accepter l’autre.
Le plus fondamental de la théologie chrétienne, c’est l’amour. La valeur sur laquelle s’enracine le christianisme, c’est l’amour. Aimer l’autre, c’est aller à son service, c’est le soutenir. C’est le tenir par la main pour bâtir un avenir meilleur. Je pense que c’est ce que Dieu nous demande.
Et au vu de ça, j’ai accepté les autres. On a grandi ensemble. Malgré notre différence, on est toujours ensemble.
Merci.
