La contestation liée au Code électoral tombe sur la table de la Commission africaine des droits de l’Homme et des Peuples (ComADHP). Après épuisement des voies de recours à l’interne suite au contrôle de constitutionnalité concluant de la Cour constitutionnelle, cinq juristes portent plainte contre le Bénin devant le Mécanisme africain.
Landry Angelo Adelakoun, Romaric Zinsou, Miguèle Houeto, Fréjus Attindoglo et Conaide Akouedenoudje demandent à la Cour de déclarer la loi n°2024-13 du 15 mars 2024 modifiant et complétant la loi n°2019-43 du 15 novembre 2019 portant code électoral contraire à la Charte africaine des Droits de l’Homme et des Peuples, la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme voire le Pacte international relatif aux droits civils et politiques.
La plainte, dont Bénin Intelligent a copie, a été déposée le 20 juin 2024. Selon nos informations, elle a été notifiée en août à l’État défenseur, le Bénin. Conformément à l’article 116(2) du Règlement (2020) de la Cadhp, celui-ci, après réception des arguments et preuves des plaignants, dispose de 60 jours pour présenter ses observations et arguments.
Au fond
Les dispositions du Code électoral qu’attaquent les cinq juristes sont celles qui font le plus du bruit. Il s’agit notamment du «mandat impératif et les conditions d’éligibilité des députés».
Les plaignants voient d’un mauvais oeil l’avant dernier alinéa de l’article 132 nouveau qui dispose qu’« Un député ou un maire ne peut parrainer qu’un candidat membre ou désigné du parti l’ayant présenté pour son élection ». Sauf l’existence préalable d’un accord de gouvernance conclu par les partis du même bord politique.
La plainte épingle aussi le seuil d’éligibilité à l’attribution des sièges : recueillir au moins 20% des suffrages valablement exprimés dans chacune des circonscriptions électorales législatives.
Les signataires observent qu’il y a une «sérieuse contradiction avec les prévisions constitutionnelles» dont l’article 80 nouveau selon lequel «La durée du mandat est de cinq (05) ans renouvelables deux (02) fois. Chaque député est le représentant de la Nation tout entière et tout mandat impératif est nul»
«Que cet état de chose viole l’article 13. 1 de la Charte africaine des Droits de l’Homme et des Peuples qui énonce que “Tous les citoyens ont le droit de participer librement à la direction des affaires publiques de leur pays, soit directement, soit par l’intermédiaire de représentants librement choisis, ce, conformément aux règles édictées par la loi ”.
Extrait de la plainte
La Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (ComADHP) est en outre invitée à statuer sur le ”caractère abusif des pourcentages du parrainage” mais aussi le caractère antidémocratique” de la disposition elle-même.
Innovations
À plusieurs occasions, gouvernement et législateurs ont pourtant soutenu le bien-fondé des dispositions querellées. Le nouveau Code entend favoriser l’émergence de partis politiques à ancrage national.
Le renforcement du parrainage devrait par exemple sonner le glas des partis claniques et régionaux. De sorte que les partis politiques deviennent les vrais animateurs de la vie politique. Il met fin également au cancer de la transhumance politique en renforçant la fidélité des élus à leurs partis, réagit la mouvance face aux critiques.
Le Bénin organise en 2026 des élections générales sur la base dudit code électoral. On attend donc la décision de la Commission dans l’affaire référencée comme ACHPR/COMM/ 848/24/735/2024.