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Mohamed Bazoum

Niger : Le très improbable rétablissement du président déchu, Mohamed Bazoum

Par Sêmèvo Bonaventure AGBON
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Des analystes ne croient plus à un retour au pouvoir du président Mohamed Bazoum déchu mercredi 26 juillet par sa propre garde présidentielle.

Par Sêmèvo Bonaventure AGBON

En quête de crédibilité et de légitimité après avoir été défiée par les coups d’Etat au Mali, Burkina Faso et en Guinée Conakry, la Cedeao entend engranger de bons points en sauvant Mohamed Bazoum. Mais son intransigeance face aux nouvelles autorités militaires nigériennes peine à prospérer.

« A ce stade, c’est hautement improbable » confie à Bénin Intelligent l’analyste en géopolitique, Régis Hounkpè. «La junte nigérienne a su mobiliser 48h après, les jeunes et les opinions du continent », justifie-t-il.

Comble de leur inflexibilité, les putschistes ont nommé lundi après l’expiration de l’ultimatum un premier ministre civil : Ali Mahaman Lamine Zeine, 58 ans. Cet économiste a été représentant résident de la Banque africaine de développement (Bad) au Tchad, en Côte d’Ivoire et au Gabon. Sous le président Mamadou Tandja il avait occupé le portefeuille de ministre des Finances jusqu’au renversement du chef de l’État en 2010.

Sa nomination par le président du Cnsp, ouvre la voie à la formation prochaine d’un gouvernement de transition. La junte semble dérouler à merveille son agenda. Pendant que la Cedeao, qui s’active toujours en faveur du rétablissement de Bazoum, se réunit à nouveau jeudi 10 août à Abuja, la capitale du Nigéria où siège l’organisation sous-régionale. Son ultimatum d’une semaine adressé aux putschistes est arrivé à expiration dimanche.

Jour symbolique, des dizaines de milliers de manifestants ont investi le stade Général Seyni Kountche de Niamey en soutien à la junte.
Paradoxe, une telle « légitimation du coup d’État par l’expression populaire » amenuise davantage les espoirs du président Bazoum, explique à Bénin Intelligent un autre politologue, Codjo Orisha.

« Il vaut mieux accompagner une transition douce », recommande-t-il face à la menace d’intervention militaire -pas toujours levée- de la Cedeao. Cette mesure radicale, en plus de consolider « un sentiment anti-Cedeao », débouchera sur un bain de sang, prévient-il.

Dimanche 30 juillet, la Cedeao avait décidé à l’encontre du Niger, du gel de « toutes les transactions de service, incluant les transactions énergétiques ». Suite à ce blocus, le Nigéria dont dépend essentiellement le pays a coupé l’approvisionnement en électricité. Le Bénin a fermé ses frontières avec le Niger, quitte à asphyxié le poumon de son économie : le Pac.

« Ce n’est pas une question d’impact individuel. C’est une question de principe général et de décisions prises au niveau de la communauté » a assumé le ministre des Affaires étrangères Olushegun Bakari lors d’une conférence de presse.

Ces sanctions, loin d’être efficaces pour fléchir les putschistes, « le peuple nigérien sera la terrible victime de cette crise », observe Régis Hounkpè dans un entretien au média Afrik.com
Sécurité

Un éventuel rétablissement du président Mohamed Bazoum dans ses prérogatives poserait la question de sa sécurité personnelle. Il ne pourrait plus compter sur la garde présidentielle encore moins sur l’armée nigérienne dont toutes les composantes se sont ralliées aux putschistes.

« Que le président Bazoum concède son éviction du pouvoir par une démission ou pas, il va s’en dire que plus rien ne sera comme avant. S’il était remis au pouvoir, c’est évident que la question de sa sécurité resterait toujours en suspens pour les 4 ans qui restent jusqu’à la fin de son mandat. Faudrait-il qu’il compte sur un corps expéditionnaire pour le garder alors que manifestement, l’ensemble de l’armée nigérienne ne semble plus pouvoir s’accommoder de son pouvoir ? » interroge l’expert en gouvernance locale Joël Atayi-Guèdègbé.

Le Niger est l’un des pays du Sahel en proie au terrorisme depuis plus de dix ans. En raison de sa proximité géographique avec la Libye, l’Algérie, le Tchad, le Burkina-Faso et le Mali. Du 1er janvier à fin juillet 2023, The Armed conflict location & event data project (Acled) a pu ainsi recenser 446 morts dans des attaques terroristes. En 2022, le ministère nigérien de la Défense nationale évoquait 1200 tués (700 civils et 500 militaires) depuis 2013, rapporte l’Agence nigérienne de presse (Anp).

Cette actualité renforce les craintes. « Sur le plan sécuritaire, je crains que ce coup de force soit une aubaine pour les groupes armés terroristes qui vont profiter des instabilités et de la concentration des attentions sur Niamey pour pousser leurs pions. Le risque de décrochage sécuritaire est évident », redoute Régis Hounkpè.

L’interventionnisme de la France a-t-il radicalisé les tombeurs de Mohamed Bazoum ? Cela « complique tout », déplore un analyste politique qui soutient que « les Français devraient se cacher un peu ».

 

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