Le conclave devant mettre fin au ”sede vacante” s’est ouvert mercredi 07 mai au Vatican. Tout en priant pour un dénouement heureux sous la conduite du Saint-Esprit, il me plaît de revenir sur l’image de Trump pontifical que nous n’avons pas fini de commenter, selon nos tempéraments et nos cultures.
En communication, les images frappent souvent plus fort que les mots. Une photo peut porter une charge symbolique qu’aucune phrase ne saurait traduire efficacement. Cela dit, je propose trois lectures possibles de cette image osée de Trump déguisé en chef de l’Église catholique romaine.
Jusque-là j’ai vu des internautes s’amuser à générer des images ”acceptables” pour se mettre en scène, ou illustrer telle ou telle scène ou idée. Autrement, bien que l’IA soit aujourd’hui à portée de tous, personne n’avait osé se représenter en Pape. Sauf lui, Donald Trump. Voici donc mes trois lectures :
1• La transgression comme signature
Cette première lecture reflète la première réaction que nous avons tous eue immédiatement sur la toile après la publication de l’image IA.
En choisissant de « blaguer » avec un symbole aussi sacré et institutionnalisé comme la papauté, Trump franchit (peut-être) la dernière limite qu’il lui restait. Cette image, générée par l’IA, publiée par lui-même, puis relayée par la Maison Blanche, dépasse le simple gag visuel. Trump montre qu’aucun tabou ne lui est infranchissable sauf s’il ne le décide.
Pour moi, l’image d’un Trump pontifical marque la continuité logique mais surtout l’endurcissement de sa stratégie de communication politique fondée sur le choc, le cru, le sacrilège, l’outrance, et l’humiliation stratégique de l’adversaire.
On l’a vu durant la campagne : Trump, blessé par balle à l’oreille, trouvait encore l’énergie de lever le poing, triomphant, quand le protocole, en pareille circonstance exigeait son évacuation discrète. On croirait même à une efficace mise en scène à but électoraliste. On l’a encore vu lors de ce duel verbal tendu avec Zelensky, en présence du vice-président J.D. Vance. Un moment jugé historique et surréaliste qui a indisposé l’Amérique et le monde.
Trump pour moi est ceinture noire de la disruption. Il parle sans filtre, visage tendu, insensible à toute indignation. Dans l’art de la transgression, Trump est un maître incontesté.
2• Une diversion politique bien rodée ?
Ma deuxième lecture de l’image d’un Trump pontifical s’intéresse à la viralité naturelle de l’image. Laquelle m’autorise à y voir une opération de diversion savamment orchestrée. Le second comme le premier mandat de Trump est jalonné de décisions controversées. Il connaît bien la stratégie de la “distraction par le scandale”, ce moment de tumulte qui détourne l’attention publique et lui accorde un répit.
Les États-Unis se sont enlisés dans un conflit militaire contre les Houthis, solidaires de la Palestine depuis 2023. Au-delà des pertes humaines au Yémen, environ sept drones MQ-9 Reaper ont été perdus, selon L’Orient-Le Jour. Leur valeur unitaire étant estimée à 30 millions de dollars.
Et voilà que, cette semaine, Trump annonce la cessation unilatérale des hostilités, sous prétexte que les Houthis ont capitulé. Une accalmie qui ne plaît guère à son allié israélien qui semble avoir pris la relève de l’aventure guerrière.
S’ajoutent à cela une guerre commerciale tous azimuts, particulièrement virulente contre la Chine, mais aussi des tensions diplomatiques avec le Canada, le Groenland… Moins de cinq mois après son investiture, Trump a ouvert de nombreux fronts. Et si enfiler la soutane amuse la galerie, l’effet de brouillard est assuré.
3• Une hypothèse audacieuse mais non absurde
Ma dernière lecture est l’interprétation la plus risquée, mais qui mérite d’être posée.
Partant du principe qu’on ne communique jamais pour le plaisir, pour rien; surtout à ce niveau de pouvoir et en tenant compte de l’ethos de l’émetteur, je me demande si Trump ne cherche pas, à travers cette image, à peser sur la désignation du successeur du pape François.
Chez nous les Fon du Bénin, un adage dit : «l’aveugle qui menace de te lancer un caillou a déjà un pied posé dessus». Autrement dit, quand le dirigeant de la première puissance mondiale « plaisante » en se proclamant Pape, il ne s’agit peut-être pas d’un simple délire visuel. Ce serait plutôt un message fort : il voudrait, sinon diriger, du moins influencer l’Église. Non pas directement, bien sûr — il n’est ni prêtre, encore moins cardinal — mais peut-être à travers une figure proche, ou un pape américain qui lui serait favorable. Un pape conservateur qui va par exemple rectifier le progressisme de François marqué par la reconnaissance d’une certaine dignité aux LQBTQ+ (confère la déclaration controversée Fiducia Suppicans). Faut-il le rappeler, Trump vient d’avoir le feu vert de la Cour suprême pour chasser les transgenres de l’armée.
Alors, un Trump pontifical ? Attendons la fumée blanche pour savoir jusqu’où va l’audace de ce message, de cette image IA et l’origine du prochain Pape. Et vous, que pensez-vous de ces 3 interprétations ?