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Recensement général : Les Bokonon engagent le ménage en leur sein 

Par Sêmèvo Bonaventure AGBON
2 Commentaires

Un recensement général des Bokonon contribuera-t-il à assainir la corporation et freiner l’élan de la cybercriminalité au Bénin ? Les concernés le pensent. L’Association des Fagbassa et Boconon du Bénin (Afab) a lancé à cet effet, dimanche 2 avril à Godomey (Abomey-Calavi), un recensement général sur toute l’étendue du territoire national.

 Par Sêmèvo Bonaventure AGBON

Sur la fiche de renseignement, chaque Bokonon fournit ses nom, prénom à l’état civil et nom de Bokonon. Son département, commune, arrondissement, quartier et ses adresses téléphoniques sont aussi renseignés. De plus, il répond à des questions comme « Depuis combien d’années est-il Bokonon ? [Exerce-t-il] les travaux de Fa dans une propriété qui lui appartient ? en location ? ou dans une propriété familiale ? Quel est le nom de culte du parrain ou de la marraine du Bokonon ?»

Une case photo est également prévue. « Nous voudrions disposer d’un fichier clair sur tous ceux qui exercent le métier de Bokonon. Ce qui nous permettra de savoir qui est qui, qui est où, qui fait quoi » explique Koffi Aza. Objectif, professionnaliser davantage la fonction de Bokonon.

Dans le rang des plus de deux cent Bokonon venus à la cérémonie de lancement, l’engouement était palpable. « L’initiative est opportune, elle permettra de rehausser le Fâ et le corps des animateurs du Fa. J’exhorte mes collègues à se joindre à ce recensement général. Il nous permettra de démasquer les faux Bokonon qui jettent de l’opprobre sur notre corporation », apprécie Bokonon Ayiminahin.

« Ce qui se passe aujourd’hui dans la corporation ne nous honore pas. Il y a des déviances »

Le projet va au-delà d’un simplement recensement. Il débouchera sur l’édition d’un annuaire des Bokonon du Bénin, la constitution d’un fichier informatisé réactualisable avec les adresses de chacun d’eux, la création d’un site internet, d’un Centre de formation et de perfectionnement, l’Académie des sciences et techniques du Fâ) voire l’Ordre national du Fa, égrène Dah Tognidjè (Koffi Aza), le président du Conseil national des cultes endogènes du Bénin (Conaceb) commis à la coordination du recensement général.

Le recensement, après le lancement officiel, se poursuit au niveau décentralisé (commune). Cette phase dure deux mois, soit jusqu’au 30 mai. Elle sera relancée chaque six mois afin d’intégrer les éventuels nouveaux.  Les initiateurs envisagent par ailleurs, de doter le corps des Bokonon d’un conseil juridique à même de défendre devant les tribunaux tout Bokonon en difficulté. « Les frais seront à la charge de notre caisse commune », précise-t-il.

L’opération se veut inclusive. « Certains expriment des inquiétudes par rapport à la possibilité que de faux Bokonon infiltrent les rangs. L’opération comporte plusieurs étapes. Nous n’exclurons personne. Même si quelqu’un se fait recenser sans être un Bokonon compétent ou chevronné, nous l’acceptons car il sera référé plus tard dans le centre de perfectionnement qui sera créé », rassure Dah Tognidjè Koffi Aza.

Le Centre de formation et de perfectionnement en vue est le cadre où les plus expérimentés auront en charge l’encadrement des débutants.

Bokonon …et cybercriminalité

Le professeur Raymond Assogba rapproche l’initiative de recensement général « au besoin d’imiter ce que les occidentaux font en termes de corporation médicale, pharmaceutique…, [or] ce n’est pas les mêmes dimensions ». Mais Dada Vognon Adidékon, le premier à se faire enregistrer est très convaincu de la pertinence du recensement général des Bokonon au Bénin. Le président de l’Afab reconnaît que « Ce qui se passe aujourd’hui dans la corporation ne nous honore pas. Il y a des déviances ».

Le Fâ est un précieux outil dans la connaissance de soi. « Le Fâ est notre canal de communication avec Dieu. Sans le Fâ on ne peut se connaître, connaître son destin et mener une vie heureuse sous le soleil. Donc il urge que nous ayons une structuration», insiste-t-il. Koffi Aza est du même avis. « Nous devons assainir la corporation des Bokonon, la sortir de l’anarchie. Nous devons aller à un Ordre structuré, et savoir qui exerce réellement cette profession », insiste lui aussi.

« Personne n’est à l’abri, parce que celui qui [recourt à vos services : savons de chance, consultations…], vous ne pouvez pas savoir tout ce qu’il fait. Personne n’est à l’abri »

La traque des cybercriminels leur donne raison. En réalité, entre la cybercriminalité et le Fa, il n’existe aucun rapport. Mais il se fait que les Bokonon ne se contentent plus d’être Boconon uniquement. La plupart d’entre eux ont le double statut de Bokonon et de Hunnon (ou Vodunnon) à la fois. A l’instar de Koffi Aza : « Je suis Vodunnon mais j’étais déjà connu en tant que Bokonon. On ne peut pas dire aux Vodunnon de laisser la profession de Bokonon et on ne peut pas dire au Bokonon de laisser la profession de Vodunnon ».

D’aucuns estiment donc qu’ils sont complices des cybercriminels. « Les Bokonon ont participé à la propagation de la cybercriminalité au Bénin. Normalement on devrait d’abord les interpeller, c’est eux qui lèguent des ‘’fétiches’’ aux jeunes pour hypnotiser leurs victimes », accuse Germain Aziel, exorciste angéologue. L’idée de recensement général des Bokonon « est très bonne », juge-t-il tout de même. Que le recensement s’accompagne de « sincérité intérieure » chez chacun des Boconon, appelle-t-il.

Des Bokonon complices de cybercriminels ? Peut-être ! Koffi Aza pense que certains Boconon innocents se sont retrouvés en prison par accident. « Personne n’est à l’abri, parce que celui qui [recourt à vos services : savons de chance, consultations…], vous ne pouvez pas savoir tout ce qu’il fait. Personne n’est à l’abri ».

Bokonon Ayiminahin crie à la calomnie face aux critiques de complicité. « Moi je suis Boconon, mais je n’ai jamais prêté main-forte à un ‘’gayman’’ ». Tout ce qu’il a réalisé, c’est grâce à des pratiques saines et « des cadeaux de reconnaissance» que des clients satisfaits lui font, jure-t-il.

« C’est un argument fallacieux » que d’imputer aux Boconon ou Vodunnon le phénomène de la cybercriminalité, réplique le socio-anthropologue et boologue Coovi Raymond Assogba. Lui pointe plutôt « La situation économique » qui « n’a pas permis de trouver de boulot » à ces jeunes.

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Vue des participants. ©S. B. AGBON/Bénin Intelligent

 

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2 Commentaires

YOBODE avril 3, 2023 - 2:01 pm

Vous êtes sûr que c’est ce qui a été dit. À vous lire on penserait que ce sont les Bokonon ou le manque d’organisation de cette corporation qui favorise la cybercriminalité au Bénin. Un total regret.

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Patrice Tenagni avril 3, 2023 - 11:45 pm

Que le recensement s’étend au plus vite comme l’a prévu l’association à tous les niveaux et que des séances de sensibilisation soient organisées car la plupart des Boconon sont des analphabètes.
Il faut leur expliquer le bien fondé de ce projet dans nos langues maternelles car un peuple se distingue à travers sa langue.
Merci du courage mes chers aînés

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